Dernière chance pour les langurs de Cat Bà
Cette
espèce est considérée par l’ Union Internationale pour la Conservation
de la Nature (UICN) comme l’une des deux espèces de primates les plus
menacées de la planète.
Le 11 novembre dernier, les
spécialistes du projet de sauvegarde du langur de Cat Bà ont réussi à
déplacer deux individus qui vivaient dans une île isolée afin qu’ils
puissent intégrer le groupe principal, sur l’île de Cat Bà.

Pour déplacer ces deux singes, il a fallu d’abord demander l’autorisation du gouvernement vietnamien. Puis un piège (un filet) a été fabriqué en Allemagne. Il y a deux ans, la caverne où ces animaux dormaient régulièrement a été équipée de ce piège.
M.
Adler a participé à de nombreux projets au Vietnam, de la construction
des Jardins zoologiques de Hanoi et Saigon en 1984, jusqu’au projet de
construction d’un centre de secours aux primates en danger à Cuc Phuong.
Mais c’était la première fois qu’il participait à un projet de
déplacement d’animaux sauvages.
Pendant plus d’une
dizaine de jours, l’équipe a attendu que les singes reviennent dormir à
la grotte. Un peu découragé, M. Adler s’est rendu dans un temple de
l’île pour demander un petit coup de pouce du destin. Et le lendemain en
soirée, il a été prévenu par deux collègues vietnamiens chargés de
surveiller la grotte que les deux langurs étaient revenus dans la
grotte. Immédiatement, M. Adler a pris la route. « Les gardiens sur
place devaient attendre en silence le retour des singes. Interdiction de
fumer ou d’utiliser le téléphone. Mais aussi interdiction de trop se
dissimuler, a expliqué M. Adler. Car s’ils s’aperçoivent que des humains
se cachent à proximité, les langurs vont se méfier. C’est pourquoi il
faut rester sur place mais faire semblant de ne pas trop s’intéresser à
eux. Une fois que les singes sont rentrés dans la grotte, mes collègues
vietnamiens ont attendu une demi-heure afin d’être sûrs qu’ils soient
endormis, puis ils ont abaissé le filet ».
Après avoir
été examinés, les deux singes ont été placés dans une grande cage sur
l’île de Cat Bà, puis relâchés peu de temps après. Trois jours après,
ils avaient déjà intégré un groupe.

Cette mission a
réussi, mais le travail des protecteurs des langurs est loin d’être
achevé. En 1991, un premier inventaire avait relevé qu’il n’existait que
200 spécimens. En raison du braconnage persistant, et ce malgré le fait
que la totalité de l’île est un parc national, il n’en restait plus en
2000 que 70 à 90. Ils seraient une soixantaine actuellement.
Selon M. Adler, « l’ Association de Conservation des espèces et des
populations animales (ZGAP Munich) et le Zoo de Münster en Allemagne
continueront de soutenir ce projet sur le long terme si elles
bénéficient du soutien positif de la partie vietnamienne dans la
protection de la forêt, des langurs, et surtout dans la lutte contre le
braconnage ».
Le langur de Cat Bà ( Trachypithecus
poliocephalus poliocephalus ) est un primate qui appartient à la
sous-famille des Colobes. Alors que la majorité du corps est recouverte
par une fourrure sombre, presque noire selon les endroits, la tête et le
cou des adultes présentent une magnifique couleur orange flamboyant.
Les petits langurs de Cat Bà sont, eux, entièrement recouverts d’une
fourrure orange. Le langur de Cat Bà possède également une longue queue
dont la taille dépasse le corps tout entier de l’animal.
Il se trouve uniquement sur l’île éponyme, dans la province de Hai
Phong au Nord du Vietnam. On dit que c’est une espèce endémique.
L’arrivée de l’espèce sur l’île a dû se faire avant la montée du niveau
de la mer due à la fonte des glaciers. C’est il y a 10.000 ans que cette
fonte des glaciers a transformé les montagnes de la baie de Ha Long en
un immense archipel.

Le langur de Cat Bà, tout comme ses
proches cousins, le langur de François ( Trachypithecus f. françoisi -
Nord du Vietnam et Sud de la Chine) et le langur à tête blanche
(Trachypithecus poliocephalus leucocephalus - Sud de la Chine) sont
étroitement liés aux zones calcaires. En effet, ces zones présentes des
anfractuosités dans lesquelles les langurs peuvent s’abriter, notamment
lors de mauvaises conditions climatiques. Un seul groupe de langurs
occupe généralement plusieurs grottes à la fois (plus de 12).
Le groupe passe seulement une à deux nuits dans la même grotte avant de
se déplacer vers un autre lieu de restauration et de repos.
La majeure partie de la journée est consacrée à la recherche de la
nourriture et au repos. Le langur se nourrit principalement de feuilles,
mais aussi de jeunes pousses, de fleurs, d’écorces et de fruits qui ne
sont généralement pas consommés par les hommes. Ce type d’alimentation
présente en effet d’importantes quantités de fibres et d’acides
tanniques et contient souvent des substances qui s’avèrent toxiques pour
les autres animaux, y compris l’être humain.- AVI