Hanoi (VNA) - La place des femmes dans l’espace public reste une question à part entière, même au Vietnam. Pour Nguyên Dac Nhu Mai, Docteur en lettres et sciences humaines, malgré de nombreux obstacles, les sociétés sont en passe de changer.
Dans un article de 2014, une journaliste du Monde avait écrit : «la rue serait-elle devenue un univers masculin ? Avec ses commerces, ses cafés, ses squares et ses terrains de jeux, l’espace public apparaît ouvert et mixte. Pourtant, plusieurs études et expériences montrent que la ville demeure un lieu sexué. Et où des +murs invisibles+ sont dressés à l’encontre de celles qui tentent d’y évoluer». Une citation qui garde encore tout son sens, en 2016.
Si la France a laissé percer sur le devant de la scène politique des ministres de la diversité avec entre autres Fleur Pellerin ou Najat Vallaud-Belkacem, au Vietnam les femmes ont certainement pris une impulsion dans les domaines sociaux, économiques et politiques depuis la fin des deux guerres contre la France et les États-Unis.
Certains écarts vus à la baisse
La condition et l’égalité des femmes au Vietnam se sont nettement améliorées, grâce aux acquis socio-économiques généraux attribuables aux réformes du milieu des années 1980. Les femmes sont maintenant presque au même niveau que les hommes en termes d’alphabétisation, ce qui constitue une amélioration remarquable par rapport au passé, où deux tiers seulement des femmes âgées de 50 ans et plus savaient lire et écrire.
Au cours des ans, les écarts entre hommes et femmes en termes de niveau d’éducation ont nettement diminué. Au sein des populations de 55 ans et plus, les hommes sont en général cinq fois plus nombreux à posséder un diplôme. Mais au sein des groupes plus jeunes, le taux applicable aux hommes ne représente plus qu’une fois et demie celui des femmes.
Cet avantage se fait également sentir au niveau des revenus comparés entre les hommes et les femmes. Selon les résultats des enquêtes, les revenus des hommes sont généralement une fois et demie plus élevés que ceux des femmes. Bien que les femmes aient atteint une plus grande égalité avec les hommes au sein de la population active, ceci ne s’accompagne pas toujours d’une égalité en termes de rémunération. Cette question est extrêmement complexe, en raison des types de carrière que les hommes et les femmes tendent à poursuivre, des diplômes acquis, du travail à temps complet ou à temps partiel et du fait que les hommes occupent traditionnellement des postes plus élevés.
Cependant, l’inégalité entre les sexes demeure encore une réalité. En dépit des taux élevés d’alphabétisation des femmes, leurs niveaux d’éducation restent inférieurs à ceux des hommes, une disparité qui s’accentue au fil des diplômes. Le pourcentage de femmes âgées de 15 ans et plus qui ne sont jamais allées à l’école est près du triple de celui des hommes. Et les fillettes semblent aussi arriver plus tôt sur le marché du travail, sans doute parce qu’elles abandonnent prématurément leur scolarité.
La place des scientifiques vietnamiennes
Les Vietnamiennes non seulement représentent une part pratiquement égale de la population active, mais aussi elles ont acquis une présence croissante dans les affaires nationales depuis la Réunification en 1976. Le Vietnam a maintenant le pourcentage le plus élevé de femmes membres du parlement en Asie.
Cependant, c’est dans le domaine scientifique que les Vietnamiennes peinent à se faire un nom. Si on ajoute les défis auxquels les scientifiques vietnamiennes doivent faire face tels que la lutte contre la faim et la pauvreté aux préjugés sexistes existants, c’est presque mission impossible.
Cependant, en septembre dernier, 72 jeunes scientifiques âgés de moins de 35 ans ont rencontré le Premier ministre Nguyên Tân Dung. Parmi eux, dix femmes dont, en particulier, l’agrégée Truong Hai Nhung. Elle était notamment la plus jeune des femmes scientifiques ayant eu l’honneur de rencontrer le Premier ministre.
Née en 1985, Nhung est enseignante au Département de zoologie et de physiologie animale de l’Université des sciences naturelles de l’Université nationale de Hô Chi Minh-Ville. Elle a déjà à son actif 9 sujets et projets scientifiques dans les biotechnologies et cellules souches, 22 articles publiés dans des revues internationales et 12 interventions dans des conférences internationales.
La technologie des cellules souches est cependant un secteur encore peu connu au Vietnam, rendant difficile la collecte de fonds et l’équipement des laboratoires. Et c’est sans oublier que la recherche scientifique demande un certain don de soi, où il est difficile pour une femme mariée de concilier travail et famille.
Malgré de nombreux obstacles, il est évident que la femme dans l’espace public a un impact particulièrement important aussi bien en France qu’au Vietnam. Le droit doit contribuer à faire reculer les obstacles de l’évolution des femmes dans l’espace public notamment en politique et dans les sciences. -CVN/VNA