La pagode Linh Son s'engage pour les enfants déracinés
La pagode Linh Son est
nichée dans une ruelle au 43/20 rue Doàn Nhu Hai, 4e arrondissement. La
trouver peut s’apparenter à un véritable jeu de piste dans ce dédale de
ruelles qui caractérise cette partie de la ville. En plus d’être peu
visible, elle tourne le dos aux maisons les plus proches. Mais
l’essentiel est ailleurs, puisqu’ici, les bonzesses apportent aux
enfants délaissés par le sort un réconfort bienvenu, et tentent de leur
faire oublier un vécu pour le moins compliqué.
Inculquer des valeurs pour une vie meilleure
La
vie de ces «réfugiés» a, pour la plupart, été un enfer avant qu’ils ne
fréquentent les lieux. Les retrouver ici bien entourés et choyés n’est
que justice. En majorité orphelins, ils ont toujours dû se débrouiller
seuls, livrés à eux-mêmes et ne connaissant de fait rien aux sentiments
et à la chaleur maternels.
C’est la bonzesse Tâm Huê qui prend en
charge ce petit monde, composé d’une vingtaine de pensionnaires. Ici
non plus, les conditions de vie ne sont pas toujours simples, dû au fait
notamment de l’étroitesse des lieux : 72 m².
Autour de la
bonzesse principale, d’autres s’activent pour s’occuper des enfants,
leur donner une éducation et tous les outils nécessaires au
«savoir-vivre ensemble». « Quand ils sont arrivés ici, tous ces enfants
avaient la même coupe de cheveux, si l’on peut dire... Au premier
regard, il était impossible de distinguer s’il s’agissait d’un garçon ou
d’une fille. Quand ils m’ont rencontré pour la première fois, ils m’ont
regardé avec une pureté dans le regard mêlée à une forme de respect que
je ne suis pas prête d’oublier. Je pouvais voir à travers leurs yeux ce
désir d’être aimé», nous dévoile la bonzesse Tâm Huê. Cette «maison du
cœur », aujourd’hui connue, reçoit la visite de nombreuses organisations
et particuliers.
Sous l’œil bienveillant de la bonzesse Tâm Huê
La
bonzesse Tâm Huê est elle aussi passée par des moments pénibles. La
santé fragile, sa mère l’a confiée à la pagode alors qu’elle n’avait que
huit ans. Cohabitant avec ses petits camarades d’infortune, c’est dans
ces murs qu’elle a appris ce qu’était le plaisir d’aimer et d’être aimé
pour un enfant. Cela l’a amenée à suivre les préceptes bouddhistes (le
karma notamment, qui, pour être produit, doit réunir l’intention d’agir,
l’acte lui-même et la satisfaction d’avoir agi, ndlr) et à devenir
l’infirmière principale pour une trentaine d’enfants avant de gagner -
pour un temps seulement - d’autres horizons.
« J’ai eu
l’opportunité d’aller étudier en Australie pour suivre une licence de
sociologie en 2004. J’y ai finalement passé sept ans. Ce qui m’a frappé
là-bas, c’est de constater que tous les enfants sont en bonne santé,
physiquement et psychologiquement. Au Vietnam, la plupart des enfants
orphelins souffrent de la faim, n’ont pas assez de vêtements et, pire,
ne sont pas scolarisés », confie-t-elle. Diplôme en poche, plusieurs
entreprises lui ont proposé un emploi, l’invitant à rester sur le sol.
Mais elle a préféré retourner dans son pays natal. C’était en 2010.
Nouveau foyer pour les personnes en difficulté
Depuis
lors, elle tente de mettre en œuvre ce dont elle a toujours rêvé pour
subvenir aux besoins de ses pensionnaires. En bonne religieuse qui se
respecte, le confort matériel n’est rien comparé à la sérénité et au
bonheur tranquille que lui apporte la vie monastique.
Son
objectif n’est pas d’inciter les enfants à prendre l’habit. Seulement de
les aider à disposer d’un bon environnement de vie et de leur donner
les outils pour s’intégrer, plus tard, dans la société. Selon elle, tout
passe par l’éducation. C’est pour quoi elle fait tout pour que ses
protégés, une fois arrivés à l’âge adulte, puissent poursuivre leurs
aspirations sur le plan professionnel. S’ils veulent rester à la pagode,
ils peuvent devenir bonzes, l’essentiel étant qu’ils soient à même de
faire leurs propres choix.
Guidée par le seul souci de leur
donner le meilleur, elle déclare: « L’espace dont nous disposons ici est
très limité alors que nous accueillons un nombre croissant de
pensionnaires. Les conditions ne sont vraiment pas optimales. Mon désir
aujourd’hui : pouvoir leur offrir un endroit plus vaste pour qu’ils
puissent jouer comme les autres enfants de leur âge ».
Dans cette
optique, la bonzesse Tâm Huê a lancé un appel à ses fidèles ainsi qu’à
des organisations caritatives locales. Grâce à eux, elle a pu acheter un
terrain agricole de plus de 10.000 m² dans la province de Long An où
elle pourra faire construire. Les coûts de construction seront pris en
charge par les dons des fidèles et des mécènes. Une fois les travaux
terminés, ce lieu sera un nouveau foyer pour les enfants, mais aussi
pour de nombreuses personnes âgées, l’autre cheval de bataille de notre
religieuse. – VNA