Au pays des cinq géants feuillus

Âgés de 300 à 700 ans, les cinq arbres séculaires de la province d’An Giang (delta du Mékong) ont été récemment reconnus au Patrimoine national. Retour sur ces génies», comme les appellent les habitants locaux, chargés d’histoires.
Âgés de 300 à 700 ans, les cinq arbres séculaires de la province d’An Giang (delta du Mékong) ont été récemment reconnus au Patrimoine national. Retour sur ces génies», comme les appellent les habitants locaux, chargés d’histoires.

Direction la région de Bay Nui dans les districts montagneux de Tri Tôn et Tinh Biên dans la province d’An Giang pour trouver ces fameux génies. La région, réputée pour sa diversité écologique, regorge de milliers d’hectares d’arbres fruitiers pluriannuels et d’une forêt. D’après les habitants locaux, il existe de nombreux arbres centenaires mais ces cinq arbres se distinguent par leur âge et leur reconnaissance au Patrimoine national en raison de leur rareté.

Un feuillage de 20 mètres de circonférence

Trente mètres de haut, doté d’un tronc de huit mètres de périmètre, le diptérocarpu à fruits ailés (cây dầu rái en vietnamien), situé dans le district de Tri Tôn, est le plus vieux avec le bel âge de 700 ans. Le Dipterocarpus alatus, de son nom scientifique, peut fournir du bois et de l’huile grâce à ses fruits. Son écorce s’écaille par plaques quasiment fossilisées.

Ses dizaines de branches constituent un feuillage extrêmement large capable de couvrir un cercle de 20 mètres de circonférence. Sa longue existence et sa forte vitalité l’ont érigé au rang de génie protecteur pour les Khmers de la région. Ces derniers établissent sous son pied des petits coins servant de lieu de culte. Lors des grandes fêtes régionales ou lors d’événements familiaux importants, les habi-tants apportent des offrandes pour invoquer la grâce de ce génie végétal. «Pour nous les Khmers, il n’est pas un arbre normal. Nous le considérons comme un génie protecteur des villages alentours et de la région», précise Chau Pone, le gardien de l’arbre.

Autre district, autre géant, Tinh Biên recense un diptérocarpu à fruits ailés du même genre mais moins âgé, 300 ans seulement. Haut de 20 mètres, son tronc possède un périmètre de huit mètres. De loin, ses racines émergeantes à l’air libre font penser à des pythons géants. Malheureusement, ces dernières années, en raison des activités de culte des Khmers locaux à son pied, une partie des ses racines ont été brûlées. «Malgré les vagues de bombes lâchées durant les années de guerre, l’arbre conserve une vitalité forte», explique Chau El, un habitant vivant à quelques mètres de l’arbre.

Le tamarinier de 600 ans

Tri Tôn est le district qui recense le plus d’arbres inscrits au Patrimoine national. Parmi eux, un tamarinier de 600 ans (cây me en vietnamien). Sa taille et son allure ont attiré beaucoup de férus de bonsaï qui ont franchi des centaines de kilomètres pour venir l’admirer. L’arbre possède une circonférence de six mètres et une hauteur de plus de 20 mètres. Son feuillage atteint, quant à lui, 20 mètres.

«Depuis tout petit, j’ai entendu mon grand-père raconter l’histoire de cet arbre. Durant les années de guerre, il a, en plus de donner des fruits, protégé le village des vents forts et servi de pavillon de garde. C’est pour cela qu’on y a établi un petit coin de culte pour le remercier», se souvient Châu Nam, guide. Et d’ajouter : «Depuis la reconnaissance de cet arbre au Patrimoine national, nous nous sommes engagés à le protéger pour toujours». Selon lui, après la floraison entre septembre et octobre, l’arbre donne des fruits aux mois de janvier et février. Ces derniers sont une spécialité de la région.

Deux letchis prophètes

Toujours dans le district de Tri Tôn, deux letchis (cây vải en vietnamien), âgés chacun de 300 ans, ont été reconnus au Patrimoine national. Tri Tôn est le seul district dans le delta du Mékong à recenser cette espèce d’arbres fruitiers. Et pour cause, le letchi ne s’adapte qu’au climat et aux conditions pédologiques du Nord. Les deux géants prennent leurs aises dans la pagode Svây Ta Hôn, espacés l’un de l’autre de 50 mètres. Un cercle de trois à quatre hommes permet d’en encercler le tronc. L’arbre atteint une hauteur de plus de 50 mètres et son feuillage peut atteindre un périmètre de 50 mètres couvrant ainsi toute la cour de la pagode.

Le bonze Châu Sa Dot, gérant de la pagode Svây Ta Hôn, révèle qu’auparavant la pagode possédait trois letchis de ce genre. Mais, il y a quelques années, celui du milieu a dépéri. «Malgré leur âge, ces deux arbres donnent des fruits. Ils sont très sucrés, mais leur taille n’atteint pas la grandeur des letchis cultivés dans le Nord», précise un habitant vivant à proximité de la pagode. Pour lui, ces letchis sont comme des prophètes : s’ils donnent des fruits, les récoltes de l’année seront bonnes, s’ils n’ont pas de fruits, l’année aura une mauvaise moisson. -VNA

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