Van Thinh, le dernier fabricant d’arbalètes à Yên Thê
Nguyên Van Thinh est
l’ultime créateur d’arbalètes dans le district de Yên Thê (province de
Bac Giang, Nord). On les utilise ensuite lors des fêtes, concours,
festivals locaux, et même dans les écoles.
La
fabrication d’arbalètes est une tradition séculaire dans le district de
Yên Thê. Autrefois, chaque famille possédait une à deux armes pour
chasser ou se défendre. Notamment pendant la lutte anti-française
conduite par Hoàng Hoa Tham (alias Dê Tham, 1846 – 1913), les
paysans-guérilleros considéraient l’arbalète comme une arme essentielle
contre les envahisseurs.
Depuis 1984, le district
de Yên Thê organise un concours de tir à l’arbalète lors de la fête
annuelle de la localité, le 16 mars.
Relance d’un métier en voie de disparition
«À Yên Thê, la seule personne capable de faire une arbalète est Nguyên
Van Thinh», indique Nguyên Dang Nông, directeur du Centre de la culture
et des sports du district. Âgé de 44 ans, M. Thinh habite dans le
village de Binh Minh, commune de Dông Vuong. C’est à l’âge de dix ans
que des personnes âgées de l’ethnie Dao lui ont transmis leurs secrets
de fabrication. «De nombreux enfants aiment bien tirer à l’arbalète.
Les hommes du village l’apportent aussi souvent en forêt pour chasser.
Lors des jours fériés, ils font des concours», confie-t-il.
Selon des anciens du village de Binh Minh, les insurgés de Yên Thê
utilisaient l’arbalète avec des flèches imbibées de poison pour tuer les
ennemis ou de grands animaux. Cette terre était connue pour ses héros
mais aussi pour ses bandits de grand chemin. Une famille sans armes
était menacée de voir tous ses biens volés. C’est pourquoi les
traditions martiales sont plus développées dans ce district que dans
d’autres localités du pays.
Certains pensent qu’une
personne maîtrisant le tir à l’arbalète est capable d’en fabriquer une.
«C’est faux », assure M. Thinh, « il faut un savoir-faire. De
nombreuses personnes âgées, comme MM. Nghi et Minh, étaient célèbres
dans la région. Mais, elles ont rendu l’âme il y a quelques années et
personne n’a repris le flambeau».
Divers usages de l’arbalète
Outre
cette acticité, M. Thinh est aussi entraîneur de tir. Il enseigne aux
écoliers locaux à bien se servir de cette arme redoutable, en vue de
compétitions au niveau du district, de la province. Nombre d’entre eux
ont remporté des victoires. M. Thinh accorde une attention particulière à
la sécurité : «La portée maximale d’une arbalète est de 150 m. Si l’on
ne fait pas attention, un accident mortel est vite arrivé. Des jeunes
du village sont déjà venus chez moi pour acheter une arbalète. Mais, je
suis décidé à ne pas leur vendre, je crains trop les accidents». Chaque
année, cet homme fabrique seulement une dizaine, au commandement du
district de Yên Thê, afin d’organiser le concours de tir lors des fêtes
et tournois sportifs.
«Les membres de ma famille ont toujours obtenu des prix lors des concours. En octobre dernier, ma femme a décroché le 1er prix lors du Festival culturel, sportif et touristique de la province de Bac Giang», informe-t-il avec une lueur de fierté dans le regard. Lors de la fête de Yên Thê de l’an dernier, son fils, Nguyên Van Lôc (22 ans), a remporté aussi le 1 er prix. -VNA