Né en 1979, Dào Dang Công Trung est le fondateur d’une compagniede services touristiques à Dà Nang (Centre), où la communauté desplongeurs appelle cet "étrange" directeur le "garde du corps" du corail.
Trung a fait connaissance avec le corail à la fin des années 1990 où,en tant que gestionnaire d’une grande marque de villégiature, ilaccompagnait des groupes de touristes internationaux qui lui ont apprisl’importance et les caractéristiques de nombreux types de coraux.
"Les coraux sous-marins sont comme des forêts tropicales : unréservoir de biodiversité, un environnement de vie pour de nombreusesespèces de poissons et d’autres espèces marines. Le corail n’existe paspartout dans le monde, il ne pousse que dans les régions équatoriales etsous-équatoriales, avec une eau propre et claire. Chaque année, uncorail ne grandit que d’un centimètre. Donc, si vous voyez un récifcorallien d’environ un mètre de haut, il a des centaines d’annéesd’existence", informe-t-il.
Les coraux sont très sensibles à la température, à la lumière et à la qualité de l’eau. "La pollution causée par les substances toxiques, les eaux usées, l’industrie du tourisme et la pêche peuvent les endommager".
Un plongeur et un bateau plein d’ordures
Passionné par la beauté des récifs coralliens, Trung a suivi des coursde formation et reçu un certificat international de plongée et desauvetage. Chaque fois qu’il en a l’occasion, il plonge pour contemplerdes coraux et… ramasser des déchets. Depuis quelques années, constatantune quantité élevée de déchets dans la mer, Trung passe de plus en plusde temps à plonger pour les ramasser. Il plonge environ une heureplusieurs fois par semaine.
Ses amis sur Facebook sont habitués aux photos de Trung Dào (son pseudoFacebook) apparaissant à côté d’un bateau plein d’ordures. Tantôt c’estun filet géant, tantôt c’est un sac contenant des centaines de canetteset de bouteilles en plastique, ou encore un fût en métal. Ce genre dedéchets, il les ramasse tous dans les récifs coralliens à Dà Nang, HôiAn, Nha Trang (Centre)... Il lui arrive aussi de plonger avec unassistant.
Au sujet des prédateurs naturels des coraux dans les fonds marins, Trung détaille : "Lapollution de l’eau peut tuer rapidement les coraux, mais la présencedes déchets contribue également beaucoup à leur destruction. Les corauxsous-marins sont très mous et se cassent facilement. Les filets descages de pêche n’ont qu’à être tirés sur le récif pour provoquer unerupture massive. Le filet fantôme ou filet déjà usé qui flotte sur lamer, s’il s’échoue sur un récif corallien, peut le briser en une seulevague".
Cette tâche de protection des coraux, Trung se l’est fixée lui-même, et n’en tire aucune rémunération pendant des années. La plongée sous-marine pour ramasser des déchets est devenue pour lui une tâche qui va de soi : "Comme si j’avais une dette envers le corail dans ma vie antérieure". D’après lui, le ramassage des déchets dans les fonds marins sont plus difficiles que sur terre à cause de la pression de l’eau et du danger de la mer. Couper un filet demande de la patience et de la minutie, pour réussir l’opération sans endommager le corail.
En moyenne, pour enlever un filet attaché au récif corallien, Trung met une demi-heure à le couper et à le tirer jusqu’au rivage. Jusqu’à présent, son record a été de retier seul des fonds marins un filet d’environ 200 m de long. Ce travail lui a demandé près d’une heure, le tout en apnée. Sans mentionner les filets d’environ 50 m, 20 m de long fréquemment remontés eux aussi. Un tonneau métallique pesant 20 kg a également été ramené à terre par le plongeur courageux, provoquant l’admiration absolue de ses confrères.
"Tirer un objet de 20 kg sous l’eau, c’est très fatigant. Il fautvaincre cette charge, ce qui veut dire nager avec des mouvements trèsforts. Sans oublier que sous 7 m d’eau, la pression de l’eau est énorme.Sans force ni expérience en natation, en plongée et maîtrise de lapression sous-marine, il est impossible d’achever cet exploit", commente un plongeur professionnel.
Prendre conscience de la beauté du corail
Le corail vit généralement sous une profondeur d’un à 20 m d’eau, etplus il est situé en profondeur, plus il est beau et unique. Afin depouvoir le contempler de ses propres yeux, Trung s’est inscrit à uncours de plongée de perfectionnement (à partir de 20 m ou plus) à NhaTrang. Pendant ce temps, chaque fois qu’il était libre, il plongeaitpour ramasser des déchets, à la surprise de nombreux confrères.
Habitué aux regards de surprise, de méfiance et même de moquerie, Trungvit à l’aise avec ces réactions depuis des décennies. Quand il avait 5ans, il ramassait des ordures à chaque fois qu’il les voyait. Quand ilse rendait deux fois par jour sur la péninsule de Son Trà (dans la villede Dà Nang), équipé de gants et d’un outil de ramassage des ordures. Sirégulièrement que de nombreux visiteurs pensaient qu’il était untravailleur environnemental. La montagne de Son Trà, grâce à lapersévérance de Trung et la forte influence de ses actions (durant plusde dix ans), est désormais considérée comme une desti-nation touristiquepropre.
Pour s’occuper du ramassage des déchets sous-marins, Trung a dépensébeaucoup d’argent, étant contraint de suivre des cours de plongée et desauvetage en mer. Mais son activité nécessite aussi la possession denombreux équipements de plongée. Scaphandre, bouteille de gaz, masque,palmes... C’est un investissement de plus d’une centaine de millions dedôngs qu’il a dû faire. Un réservoir d’oxygène que seuls les plongeursprofessionnels sont autorisés à utiliser pour une seule plongée deramassage des ordures lui coûte 100.000 dông, et pour le recharger, ilfaut aller à Hôi An.
Conscient du pouvoir de communication des photos, Trung a décidé dedépenser plus de 300 millions de dôngs pour acheter un ensemble decaméras spécialisées pour la prise d’images sous l’eau : "Jevoudrais donner la chance à ceux qui n’ont jamais eu l’occasion deplonger d’admirer ce qu’il y a sous l’eau, et de montrer comment la viemarine est riche et le corail est beau. Je veux que le monde entier lesache, afin que chacun ait la responsabilité de protéger la mer".
Les photos de mer et de forêt de Trung Dào, bien qu’ellesn’apparaissent que depuis quelques années, lui ont valu de nombreux prixde photographie, nationaux et internationaux. Elles ont égalementtouché bien des personnes. Afin de vivre pleinement sa passion pour lessports nautiques, Trung a fondé la Sarl de commerce et de services MânThái, populaire pour le stand up paddle (SUP) ou planche à pagaie. Il s’agit d’un sport de glisse nautique où le pratiquant se tient debout ("stand up" en anglais) sur une planche plus longue qu’une planche de surf classique, se propulsant à l’aide d’une pagaie ("paddle").
Les circuits de cette société sont spéciaux. Tous les matins,l’entreprise organise des tours de SUP au tour de l’île de Hon Sup, etles participants sont prévenus : si vous voyez des déchets dans la mer,ramassez-les !
Généralement, à chacune de ces sessions, les pratiquants de SUPramènent en moyenne 10 kg de déchets. De nombreux jeunes intéressés parce travail aident également avec enthousiasme le directeur Trung. Denombreux filets usés qu’il a ramassés dans le fond marin ont été ramenésau rivage par les rameurs SUP.
Trung s’est rendu dans la ville avoisinante, Huê (province de ThuaThiên-Huê) pour inciter à se servir du SUP pour ramasser les orduresdans la lagune de Tam Giang. Aujourd’hui, pratiquer le SUP pour ramasserles ordures est devenu une activité régulière de l’équipe SUP de Huê.
De temps à autres, des compagnons veulent se joindre au “sauveteur du corail” pour ramasser les ordures. "C’estassez compliqué en général, car chaque groupe de cinq personnes ou plusplongeant ensemble devient une plongée organisée , et cela nécessitedonc une autorisation. Sans oublier que les plongeurs normaux nedescendent qu’à une profondeur de 5 à 7 m. La plupart de mesdéplacements sous-marins consistent à ramasser des déchets à moins de 7 mde profondeur, j’y vais seul, c’est pratique de le faire, dansn’importe quel endroit où je vois des déchets, je les ramasse".
Il faut tout d’abord assurer sa sécurité !
Quelles sont les critères pour devenir un "garde du corps" du corail ? Sans hésiter, Trung explique : "D’abord,vous devez assurer votre propre sécurité”. Lui-même en est un exemple,sachant nager depuis l’âge de 5 ans, dans l’eau "comme une loutre", il doit encore passer par beaucoup d’entraînement avant de plonger en toute confiance pour ramasser des déchets.
"Plus l’eau est profonde, plus elle est dangereuse. En plus d’avoirde bonnes compétences en natation et en plongée, vous devez égalementcomprendre la mer dans laquelle vous nagez. Sous la mer, il est interditde toucher la faune et la flore. En effet, de nombreux types de corauxou de poissons sont toxiques. Et rappelez-vous de ne pas vous lancer àl’aveuglette. Il faut comprendre votre limite, votre force. N’essayezpas trop fort, il est facile de perdre votre souffle, de perdre votreforce ou de vous évanouir. Moi-même, parce que j’étais poussé par monenvie de ramasser des ordures, j’ai perdu mes forces une fois, maisheureusement tout s’est bien passé. Lorsque vous plongez en profondeur,vous devez également être accompagné par quelqu’un, afin que s’il y a unproblème, il puisse être traité à temps".

La plongée pour ramasser des ordures sous la mer, cela exige del’énergie, prend du temps et coûte cher. C’est pourquoi le nombre decompagnons de Trung peut être compté sur les doigts d’une main. "Toutle monde n’a pas la même passion que moi. La plupart des gens disentque ce type est fou , que je n’ai rien à faire, que je gaspille dutemps pour une affaire que personne d’autre ne fait. Parfois, certainespersonnes sont enthousiastes, mais elles ne sont pas en mesure de nagercomme moi.
Mais bonne nouvelle, les personnes qui ont décidé de suivre Trung sesont ensuite portées volontaires pour contribuer à cette opération. Ilssont devenus un groupe de "gardes du corps" du corail. Chaque foisqu’ils remontent à la surface, ils ramènent quelques dizaines de kilosd’ordures en tous genres. Une belle opération collective pour lebien-être de l’environnement sous-marin. - CVN/VNA