Hô Chi Minh-Ville (VNA) – Alors que le Vietnam manque cruellement de main-d’œuvre qualifiée, les écoles professionnelles rencontrent des difficultés pour attirer les apprentis. Pour combattre les préjugés, le secteur éducatif doit repenser le processus d’orientation des élèves et développer les outils de promotion.
Le Sud du Vietnam baigne aujourd’hui en plein paradoxe. Les nombreuses zones industrielles (ZI) et franches (ZF) de la région recherchent sans relâche à engager des ouvriers, qu’ils soient au niveau du 1er ou 2e cycle d’études. Bien que ces derniers représentent une part importante de la population active, l’offre n’arrive pas à satisfaire la demande en main-d’œuvre ouvrière, et un déséquilibre tend à s’installer.
Un ratio déséquilibré partout
Pour Hoàng Ngoc Vinh, directeur du Département de la formation professionnelle relevant du ministère de l’Éducation et de la Formation, «si la proportion de travailleurs ayant des diplômes universitaires et postuniversitaires représente plus de 25% des actifs, c’est du gaspillage. Normalement, pour stimuler l’économie dans un pays développé ou en voie de développement, le nombre d’employés issus d’écoles de formation professionnelle doit être plus élevé que ceux venus des autres établissements».
Au Vietnam cependant, le ratio de travailleurs n’est pas suffisamment équilibré. La proportion de diplômés au niveau universitaire, comparée à celle au niveau de technicien et enfin au niveau ouvrier est de 1 – 0,43 – 0,56, alors que la moyenne mondiale est de 1 – 4 – 12. Cinq ans après la mise en application de la stratégie de formation professionnelle, le taux d’inscription dans les écoles professionnelles n’avoisine que 53,4%.
En outre, actuellement, le nombre de travailleurs qualifiés ne répond pas aux besoins des entrepreneurs. Plus précisément, dans les ZI et ZF de Hô Chi Minh-Ville, seuls 18% des travailleurs possèdent le brevet de l’école de formation professionnelle. Les ZI et ZF de Dông Nai emploient plus de 493.000 travailleurs, mais seuls 32% ont obtenu une certification de l’école professionnelle.
Selon les prévisions, entre 2015 et 2020, les entreprises établies dans ces zones à Hô Chi Minh-Ville devront embaucher environ 100.000 travailleurs répartis comme il suit : 10% de diplômés universitaires et secondaires, 30% de travailleurs de base et 60% d’ouvriers techniciens. Tandis que la province de Dông Nai aura besoin d’ici à 2020 d’environ 600.000 travailleurs pour ses ZI et ZF.
Des données et des prévisions qui démontrent que les étudiants des écoles professionnelles peuvent trouver un emploi facilement, et ce, dès la fin de leurs études. En revanche, la situation est un peu plus compliquée pour les universitaires, qui à la fois ne sont pas certains de décrocher un poste et, qui plus est, obtiennent un salaire comparable à celui des ouvriers.
Des arguments qui n’arrivent pourtant pas à motiver les jeunes à s’inscrire dans les écoles professionnelles. Raison essentielle : ces établissements souffrent encore d’une mauvaise image et ont du mal à se débarrasser de leurs clichés. Les candidats échouant aux concours d’entrée des universités préfèrent attendre l’année suivante pour se représenter ou se diriger vers des universités privées, au lieu d’opter pour des écoles professionnelles.
Comment susciter des vocations ?
Pour faire face à cette réalité, le secteur de l’éducatif a décidé de prendre le problème à bras le corps, et de développer tout un arsenal pour sensibiliser les jeunes à la formation professionnelle. Cette dernière est plus présente et mieux mise en avant lors des salons étudiants et les foires à l’emploi, des rencontres entre les ouvriers à forts revenus et des élèves ont été organisées et même les modalités et les formats des concours d’entrée aux universités ont été changés. Et si le Vietnam s’inspirait des pratiques qui ont fait leurs preuves à l’étranger ? Pour M. Hossomer, directeur de l’Organisation de coopération allemande pour le développement du travail, «les écoles professionnelles en Allemagne et de nombreux autres pays attirent les étudiants grâce à l’orientation efficace des étudiants. Si le Vietnam met en place ce système, les écoles professionnelles n’auront aucun mal à les faire venir».
Selon Dô Minh Hoàng, directeur du Service de l’éducation et de la formation, l’orientation des élèves doit commencer dès la 9e année. Les élèves doivent être consultés plus tôt pour déterminer leurs options futures, poursuivre des études au cycle supérieur ou rentrer dans les écoles professionnelles. En optant pour le deuxième choix, les élèves qui n’ont pas le goût pour les études ou qui sont en difficulté scolaire pourront apprendre un métier, tout en bénéficiant d’aides financières. Du point de vue des universités, la réorientation précoce leur permettrait d’éviter des dépenses inutiles. M. Hoàng conclut qu’en parallèle à ces mesures, il est impératif de créer plus de bourses d’études dédiées aux écoles professionnelles, pour attirer d’avantage les élèves et leur permettre enfin de pleinement se réaliser. – CVN/VNA