Les patrimoines font leur entrée dans les manuels scolaires
À l’heure de l’explosion des nouvelles technologies de l’information,
les jeunes sont de plus en plus attirés par des jeux vidéo et des
divertissements qui prônent la violence. L’introduction de la culture
populaire dans les écoles a donc pour objectif de les inciter à
s’intéresser à des activités plus «saines».
À travers les jeux
«Enseigner l’héritage culturel du Vietnam à l’école est un axe important de la réforme de l’enseignement général. Nous souhaitons par ce biais aider la jeune génération à prendre conscience du respect, de la préservation et de la promotion des valeurs traditionnelles du pays», explique un représentant du ministère de l’Éducation et de la Formation.
Aussi la culture populaire est-elle désormais
intégrée dans le programme d’enseignement de plusieurs établissements
scolaires du pays, qui organisent des activités ludiques.
Voici
l’exemple de l’école primaire Dich Vong A, à Hanoi, qui organise chaque
année une fête foraine. «Nous ne l’avons pas créée pour le folklore.
Avec un nouveau thème chaque année, cette foire fait partie intégrante
de notre stratégie éducative. Et cela fonctionne, elle est devenue un
rendez-vous incontournable. Les élèves profitent de la journée pour
s’amuser, regarder les stands et acheter tous types d’objets
artisanaux», explique la directrice d’école Nguyên Thi Phuong Lan.
Cette
kermesse offre aux élèves un espace de rencontre et d’échange, de
valorisation et de mutualisation de leur travail quotidien, permettant
d’enrichir leur vécu culturel. Ces rencontres sont également l’occasion
de découvrir les us et coutumes de différentes régions : des pièces de
théâtre mettent en scène des rites du Nouvel An, et des jeux populaires
sont proposés comme la lutte à la corde, les échecs traditionnels, etc.
«C’est une petite action de grande valeur», estime-t-elle.
De
plus, à l’occasion de la Fête de la mi-automne, l’école organise pour
ses élèves une «fête de la pleine lune» au Musée de l’ethnologie,
toujours à Hanoi. Il s’agit d’une animation au cours de laquelle les
élèves interprètent divers répertoires traditionnels (chant ou danse),
et participent à des jeux. Ils sont également initiés à l’artisanat, et
fabriquent eux-mêmes leurs lanternes, leurs figurines en pâte de riz
colorée, et leurs gâteaux de la mi-automne, etc. « Ces activités
permettent de renforcer efficacement l’échange, la solidarité, la
conscience, l’amour de la nature et du pays, contribuant ainsi à
inculquer aux jeunes les traditions culturelles de la communauté des
ethnies du Vietnam», confie Nguyên Thi Phuong Lan.
Et d’ajouter :
«Aujourd’hui, les élèves manquent d’expériences et de connaissances
pratiques. Afin que ces activités ludiques aient le maximum d’impact,
elles doivent être associées à des événements précis».
Une jeune génération responsable
Non
seulement Hanoi, mais bien d’autres localités s’intéressent aussi à
cette problématique. Chaque province a mis en place ses mesures propres.
\Des jeux populaires sont proposés aux écoliers comme la lutte à la corde. Photo : Thanh Vu/VNA
Dans le Nord du pays, Phú Tho a ainsi décidé d’axer son
action sur la conservation et la relance du hát xoan en tentant de
raviver l’intérêt de la population pour ce chant printanier
traditionnel. Des cours ont donc été incorporés dans les programmes
scolaires. Pour Nguyên Bích Hà, enseignante de l’École des ethnies de
Phú Tho, il ne s’agit pas seulement d’enseigner des chansons, mais
également de sensibiliser les élèves sur l’immense valeur des airs
traditionnels de leur pays, et sur la responsabilité qui leur incombe
quant à leur préservation. «Dans cette optique, nous pensons que la
perspective de se produire sur scène constitue une réelle motivation. Il
est ainsi plus aisé de les inciter à apprécier le +Hát xoan+ et de
façonner leurs goûts musicaux», estime Nguyên Bích Hà.
Et si la
province de Phú Tho a son hát xoan , celle de Bac Ninh (Nord) possède
son chant alterné quan ho , et celle de Nghê An ses chants folkloriques
"Ví " et "Giặ m " .
Enfin, à Hô Chi
Minh-Ville, l’enseignement de la musique traditionnelle dans les écoles
prend une place importante dans la transmission des savoirs dans ce
domaine. À la rentrée 2012-2013, l’école primaire Trân Bình Trong (5 e
arrondissement) a ainsi créé une nouvelle discipline et le succès a été
immédiat, encourageant de fait les autres établissements à faire de
même. De nombreux chercheurs et éducateurs se préoccupent de cette
question, dont Trân Van Khê.
Il y a une dizaine d’années, ce
professeur était l’un des premiers à s’engager pour la démocratisation
de la musique traditionnelle auprès de la jeune génération. En 2004, il a
ainsi participé à développer la créativité des élèves de l’école
primaire Trân Hung Dao (Hô Chi Minh-Ville). Mais pour de multiples
raisons, le projet n’a pas pu s’étendre à d’autres structures. À regrets
pour le professeur Trân Van Khê.
Il a ensuite fallu attendre
l’année scolaire 2012-2013 pour que la ville mette en place des mesures
concrètes. «Dans la pratique, il s’agit de la transmission d’un socle
de connaissances sur la musique traditionnelle d’un côté, et d’ateliers
de chants et de danse de l’autre. Non seulement les élèves, mais les
enseignants doivent également être impliqués, ainsi fourniront-ils une
formation des plus efficaces». C’est en tout cas ce qu’affirme Nguyên
Thi Kim Ân, directrice de l’école primaire Trân Bình Trong.
Le
Vietnam n’échappe pas aux conséquences non moins néfastes de la
mondialisation. Inciter les jeunes générations à continuer de porter le
flambeau des valeurs traditionnelles du Vietnam, grâce à la musique et
aux jeux, le défi reste donc immense. - VNA