Le 2 mai dernier, dans la rubrique Travelling (Voyages) du New York Times, l’article «Learning to love "the people's food" in Ho Chi Minh City» a attiré l’attention des lecteurs «vietnamophiles». L'article était signé Matt Gross, un journaliste américain spécialisé dans le tourisme et la gastronomie.

À l'été 1996, Matt Gross a débarqué à Hô Chi Minh-Ville avec l’idée de vivre quelques temps à l'étranger après sa sortie de l'université. Et pourquoi avoir choisi le Vietnam ? Réponse : pour la gastronomie locale ! Une passion née dans les restaurants vietnamiens de Virginie, du Maryland et de Washington. Ses plats préférées : viande grillée et pho au boeuf. Ce dernier est «un met national», selon lui.

À la découverte de la cuisine de rue

Une belle expérience, inoubliable, notamment les déjeuners. «Dans la chaleur accablante de midi, à côté des bruyants chantiers de construction, tout semblait se diluer devant vos yeux, il ne vous restait plus que la sensation d'avoir faim et l’envie de manger», a-t-il écrit.

Au Vietnam, le premier met qui a fait saliver les papilles de Matt Gross, ce sont les anguilles grillées enroulées autour d'un morceau de canne à sucre. «Des aiguilles grasses, un peu d’huile, de l'ail, du nuoc mam (saumure de poisson), un peu d'épices, avant d’être grillées. Ensuite, une bonne odeur d’épices, de condiments et des anguilles un peu sucrées», a-t-il décrit.

Matt Gross est passé de surprise en surprise. Il a d’abord mangé du pho au déjeuner au restaurant pho Hoà-Pasteur. Quand il a raconté à ses élèves vietnamiens son expérience (ndrl : Matt Gross a enseigné l'anglais), ils été très surpris. Ils lui ont expliqué que l'on déguste le pho au... petit-déjeuner. «Mais, ce restaurant est rempli de Vietnamiens à midi !», a-t-il rétorqué. Alors, les élèves lui ont dit : «Vous pouvez en prendre à n'importe quelle heure de la journée, pas de problème. Mais pour les Vietnamiens du cru, c’est au petit-déjeuner seulement».

Remise en question

Ne parlant pas vietnamien et un peu timide, Matt Gross s’est vite aperçu qu’il ne fréquentait que les restaurants pour touristes, là où tout est confortable : serveur anglophone, menu en anglais.... Pour découvrir la vraie cuisine de rue, il lui a fallu se faire un peu violence, c’est-à-dire aller là où seuls les Vietnamiens vont.

Il a alors commencé à fréquenter les endroits les plus populaires qui soient : les fameux restaurants de «riz poussière» (com bui en vietnamien). «Au Vietnam, des restos de riz poussière, il y en a partout». Une nouvelle découverte pour Matt. «À cette époque-là, il suffisait d'un peu plus d'un dollar pour être rassasié : assiettée de riz, viande, légumes...», a-t-il expliqué. Mais il a avoué quand même avoir eu certaines difficultés avec l’ambiance «rustique» de certains bouis-bouis qu’il a fréquentés : ustensiles de cuisine antédiluviens, murs et sol crasseux. «Mes goûts et mon tempéramment étant ce qu’ils sont, j’ai parfois eu du mal à faire face à de tels défis», a-t-il confié. Mais ce gastronome n’a pas pu résister à l'odeur des côtes grillées. Et il a trouvé la solution : le repas à emporter ! Des côtes marinées avec un peu d'ail, de sucre, de nuoc mam, des oignons, accompagnées de riz, de liserons d'eau et de concombres, le tout déposé dans une petite boîte en polystyrène. Et bonheur suprême : la dégustation devant chez lui, dans une petite cour bien tranquille.

Rapidement, l’Américain est devenu un fin connaisseur de la cuisine de rue. «J’ai pris goût aux restaurants de rue, j'ai observé les Vietnamiens mangeant soit avec des baguettes, soit avec des cuillères ou les deux. J'ai appris aussi la façon de préparer de la sauce à base de nuoc mam, de tranches de piment, d’un peu d'eau, de sucre, de citron. Bref, je me suis vietnamisé», a-t-il affirmé.

Un parcours initiatique qui a été le meilleur souvenir de Matt Gross durant ses quelques mois passés au Vietnam.

Matt Gross est un collaborateur du New York Times pour la rubrique Frugal Traveler (Touriste à petit budget). Il est aussi rédacteur de plusieurs pages web sur le tourisme et la gastronomie comme Bon appetit, Saveur, Afar, WorldHum. Il a aussi son blog personnel : Worldmatt.org

«Nourriture de rue» est une expression courante de nombreuses cuisines dans le monde, tout spécialement en Asie. Elle propose à une clientèle pressée, qui entend se restaurer pour un excellent rapport qualité-prix, un répertoire de recettes locales, ménagères, plus ou moins sophistiquées et qui ont pour point commun la fraîcheur des ingrédients et de leur préparation. - VNA