Coup de foudre et regards cousins au pays des langur
L’Américain Larry Olibarri et
l’Allemande Ulrike Streicher se sont rencontrés «par l’entremise» des
doucs langur, des singes que l’on ne trouve plus guère qu’au Vietnam.
En 2005, alors qu’il était étudiant dans le Colorado,
Larry Olibarry, en cherchant des documents sur les animaux menacés, est
tombé sur des informations sur les doucs langur. Vivement intéressé,
il a commencé à creuser le sujet et a appris que la péninsule Son Trà
(ville de Dà Nang, Centre), au Vietnam, était l’un des meilleurs
endroits où l’observer.
Trois ans après, alors
qu’il travaillait au Service des sciences et des technologies de Dà
Nang, il a demandé la permission de faire des études sur les doucs
langur, et cette demande a été acceptée.
Lors d’un
déplacement dans le parc national de Cuc Phuong (Ninh Binh), où se
trouve un centre de protection des primates, il a rencontré Ulrike
Streicher, qui travaillait pour une ONG allemande. Six mois après, ils
se sont mariés et ont décidé de rester au Vietnam.
«Larry est 10 ans plus jeune que moi. C’est vrai qu’au Vietnam nous
sommes un peu perçu comme un couple +boiteux+ en raison de la différence
d’âge, défavorable à la femme je veux dire, s’amuse Ulrike. Nous
partageons la même passion pour les doucs langur et les animaux menacés.
Cette passion nous a aidé à effacer cette différence et à nous
rapprocher», sourit Ulrike.
Ils ont ensuite déménagé
à Dà Nang et toutes les week-ends, ils se rendent dans la réserve
naturelle de Son Trà. Ils partent à 05h00 du matin et ne rentrent que le
soir. «Nous avons peur des pièges, qui sont partout et si nous ne
faisons pas attention, nous pouvons être blessés, confie Larry.
S’approcher des doucs n’est pas simple car ils se cachent tout de suite
quand il y a des étrangers à deux pattes».
Mais
Larry et Ulrike ne sont plus des humains étrangers, et ont réussi à se
faire accepter des primates. Il leur a fallu quand même près d’un an
pour «faire connaissance». Selon Larry, si les singes sont en confiance,
ils peuvent s’approcher, très près parfois.
«La
péninsule de Son Trà abrite un patrimoine naturel : les doucs langur.
Sur la planète, il n’y a guère qu’ici qu’ils subsistent», explique
Larry. Le terme de douc langur regroupe en fait trois espèces ( Pygathix
nemaeus, Pygathix nigripes et Pygathix cinerea ), toutes présentant
un pelage très coloré.
Larry vient d’organiser une
exposition de certaines de ses photos au centre de protection de la
nature de Son Trà. Selon lui, Son Trà compte 985 espèces végétales, 36
d’animaux, 106 d’oiseaux, 23 de reptile, 9 d’amphibiens et 113
d’insectes. Beaucoup d’entre eux sont classées dans le Livre Rouge du
Vietnam.
Toujours selon lui, il ne resterait à Son
Trà que 150-160 doucs langur. De 2007 à 2010, leur nombre a baissé de
15%. Le braconnage reste un problème épineux dans la réserve. En 2010,
les garde-forestiers de Dà Nang ont découvert cinq doucs encore vivants
chez des braconniers.
«Nous pensons que chaque mois,
au moins un singe est tué», déplore Larry. Ulrike partage cette
inquiétude : «Les deux principales menaces pour Son Trà, ce sont le
développement du tourisme qui a réduit l’espace vital des singes et le
braconnage».
Face à cette situation, le couple a
organisé des expositions pour sensibiliser les habitants locaux,
notamment les enfants qui sont bien plus réceptifs que leurs parents.
Ils ont ouvert des expos dans toutes les écoles de l’arrondissement de
Son Trà, et ce sur leurs propres deniers.
«Le risque réel de
disparition de ces singes nous a poussés à aller à la rencontre des
habitants pour les sensibiliser», dit Ulrike.
Larry compte organiser d’autres expositions, dans d’autres régions du Vietnam mais aussi ailleurs dans le monde. – AVI