
Hanoï (VNA) - Avecle souhait de "changer de vie", beaucoup de travailleurs vietnamienspartent clandestinement pour l’étranger. Ils se confrontent alors auxdangers et aux conséquences néfastes du travail illégal. Certains ontmême sacrifié leur vie.
Les personnes "sans-papiers" ne bénéficient d’aucune protectionlégislative, elles prennent donc des risques importants et peuvent mêmemettre leur propre vie en péril dans le seul but de rejoindre des paysmiroitants de meilleures conditions de vie.
Les dangers sont nombreux : conditions de sécurité et de travailextrêmement précaires ; pression excessive et exploitation ;non-paiement des salaires ; confiscation des passeports et papierspersonnels…
Une fois le réseau de migration illégale découvert par les autorités,les immigrés clandestins sont expulsés vers le Vietnam. C’est pourquoices réseaux sont souterrains et les travailleurs évitent de se contacterentre eux.
Cependant, pour gagner mieux leur vie et rembourser les dettesaccumulées pour payer ce "voyage illégal", de nombreux travailleurs"sans-papiers" sont forcés d’accepter des emplois clandestins àl’étranger.
Selon les récentes statistiques du ministre de la Police, chaque année,environ 3 millions de Vietnamiens partent pour l'étranger et entrentdans le pays par voies illégales. Ces trafics ont lieu en majorité auxfrontières entre le Vietnam et la Chine (dans 75% des cas), le Cambodgeet le Laos.
Des leçons chères payées
Accompagnés des cadres et des soldats du poste-frontière de Dàm Thuy,du district de Trung Khanh, dans la province de Cao Bang frontalièreavec la Chine, nous rendons visite à la famille de Nông Thi D (née en1990, dans le hameau de Ban Mom, de la commune de Dàm Thuy). Son mari,parti pour la Chine afin de trouver un travail complémentaire, estdécédé début 2016.
"Composée de cinq membres, ma famille est l’une des plus pauvres duhameau. En raison de son faible niveau de formation, mon mari n’a paspu trouver un emploi dans les usines locales. Donc, quand il n’était pasoccupé avec les travaux champêtres, il partait pour la Chine pour ytravailler en tant que saisonnier agricole, coupeur de canne à sucrepour être exacte. Il est décédé suite à un accident de travail en Chine.Ma famille a perdu beaucoup de temps et d'argent pour ramener sescendres au Vietnam", raconte Nông Thi D.
Nông Thi M. (belle-mère de Nông Thi D.) regrette : "Je suis vieilleet malade, les deux enfants sont petits. Suite à la mort de mon fils,Nông Thi D. devient le pilier de la famille. Je sais que la migrationtransfrontière illégale est une violation de la loi et comporte denombreux risques, mais mon fils n’a pas eu le choix, il devait rapporterassez d’argent pour que la famille puisse survivre".
Le cas de la famille de Nông Thi M. n’est pas isolé dans la commune de Dam Thuy.
Dans le hameau de Phac Cat, Ly Van N. a perdu son enfant en 2012 aprèsson départ en Chine pour le travail. Quelques temps après le décès deson fils, sa belle-fille faisait à son tour la traversée de la frontièreillégalement. Depuis son départ, Ly Van N. n’a reçu aucunes nouvellesde sa belle-fille. Il doit maintenant s’occuper de ses deuxpetits-enfants.
Des enfants orphelins
"Avec l’absence de leurs parents, mes petits-enfants font face à beaucoup de difficultés matérielles et psychologiques" confie Ly Van N en faisant part de ses regrets : "simes enfants n’avaient pas franchi illégalement la frontière pourl’étranger, mes petits-enfants ne seraient pas orphelins aujourd’hui".

Dans la commune de Minh Long, du district de Ha Lang, Luong Van P restechoqué de son séjour en Chine. À la fin de 2018, suivant les conseilsd’un proche de sa famille, il a vendu 2 cochons et 3 tonnes de riz pourrécolter l'argent nécessaire à son voyage avec pour promesse un salairemensuel de 10 -12 millions de dôngs (450-500 USD/mois).
Ensuite, il a pris les chemins habituels traversant la frontière endirection de la Chine à l’aide d’un réseau de trafic humaintransfrontalier, avant d’atteindre la province de Guangdong. Là-bas,Luong Van P et un certain nombre de saisonniers vietnamienstravaillaient dans une plantation de cannes à sucre. Sous prétextequ’ils ne parlaient pas chinois, les salaires des travailleursvietnamiens ont été réduits à 60 yuan (soit environ 180.000 dôngs) parjour.
Les "sans-papiers" vietnamiens travaillaient dans la plantation dumatin jusqu'à tard le soir, dans des conditions de travail pénibles etsans paiement de salaire.
Au cours de leur troisième mois sur place, Luong Van P et 17 autrestravailleurs vietnamiens ont été arrêtés par les autorités chinoisespour leurs activités clandestines. Après vérification de leursinformations personnelles et un examen de santé, ils ont été placés endétention pendant près d'un mois avant leur reconduite auposte-frontière du district de Trà Linh, dans la province de Cao Bang.Après 3 mois de labeur en Chine, Luong Van P a perdu 12 kg. "Dorénavant, je reste au Vietnam, je n’ai pas l’intention de repartir en Chine pour y travailler illégalement" conclut-il.
Des solutions pour lutter contre la migration illégale
Afin de lutter contre la migration illégale, les comités du Parti etles autorités locales vont se coordonner avec les forcesintersectorielles telles que la police, les gardes-frontières ou lessyndicats... afin de renforcer la gestion et la prévention de ce trafichumain.
Dernièrement, les provinces frontalières du Vietnam offrent davantagede formations professionnelles afin que les travailleurs locauxdisposent de plus de qualifications, en particulier les victimes de latraite d’êtres humains et notamment les femmes et les enfants.
Ces provinces accordent des prêts à taux préférentiels pour mettre enplace un modèle économique en faveur des jeunes pour qu’ils puissentainsi sortir de la pauvreté et accéder à des conditions de vie décentes.
En outre, les procédures administratives sont remaniées pour simplifierl’accès aux laissez-passer et aux passeports et limiter ainsi lesentrées et sorties illégales...
Le Vietnam et ses pays voisins, et notamment la Chine, ont signé desaccords de coopération dans la gestion de la main-d'œuvretransfrontalière pour mettre fin à la la migration illégale.
Par exemple, en 2018, un protocole d'accord entre le Comité populairede Cao Bang et la ville de Sung Ta, province de Guangxi (Chine) a étératifié afin de définir la coopération entre les deux parties dans lalutte contre le trafic humain et le labeur clandestin.
Le Vietnam promeut la migration légale de ses travailleurs à l’étrangernotamment au Japon ou en République de Corée et vise d’autresdestinations comme l’Australie, les États-Unis, le Canada, la Finlande,l’Italie, la Bulgarie, la Hongrie, le Bruneï, Singapour, ou encorel’Arabie saoudite… - CVN/VNA