La conférence de Genève sur l’Indochine, tenue du 8 mai au 21 juillet1954, a subi les conséquences de la tendance générale à la détente entreles grandes puissances après la guerre de Corée. Aux Quatre Grands -États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’Union soviétique - s’estjointe la Chine qui fait ainsi son entrée sur la scène diplomatiquemondiale.
Avec l’objectif suprême de défendre lesintérêts nationaux que sont l’indépendance, la souveraineté, l’unité etl’intégrité territoriale, la délégation vietnamienne dirigée par levice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Pham Van Dông alutté pour obtenir des solutions militaires et politiques.
Sur le plan militaire, il s’agissait d’obtenir un cessez-le-feu,d’exiger le retrait des troupes étrangères et de rétablir la paix enIndochine. Sur le plan politique, il fallait obtenir la garantie de lapaix, de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale duVietnam, du Laos et du Cambodge tout comme la fin du colonialismefrançais en Indochine.
Cependant, les buts desgrandes puissances à la conférence de Genève étant trop divergents, lesnégociations furent extrêmement tendues et compliquées. Les grands paysse sont donné le droit d’imposer un ordre en Indochine. À Genève,certains intérêts ont donc été sacrifiés par les grandes puissances,pour des raisons politiques qui ont pris le pas sur les exigences dudroit international.
«La conférence de Genève a étéorganisée à l’initiative des puissances qui cherchaient à imposer auVietnam une solution qui leur serait bénéfique. De son côté, en tant quevainqueur de la campagne de Diên Biên Phu, la République démocratiquedu Vietnam a participé à la conférence de Genève avec un objectif biendéfini», a écrit le vice-Premier ministre et ministre des Affairesétrangères Pham Binh Minh dans un article paru à l’occasion dusoixantenaire de la signature des accords de Genève.
En 1954, le Vietnam est arrivé à la Conférence de Genève en vainqueuret avec une juste cause. Les efforts du peuple vietnamien pour la paix,l’indépendance et l’intégrité nationales se sont conformés àl’aspiration des progressistes du monde entier, y compris le peupleprogressiste de France. Ainsi, la juste cause du Vietnam est soutenuepar l’opinion internationale.
«Toutefois, sesdémarches concrètes concernant le plan de négociation et la coordinationdes forces lors des négociations ne cessaient d’être modifiées parl’intervention des puissances. Cela a laissé des impacts considérablessur l’effort de la délégation vietnamienne pour maîtriser lesnégociations», a analysé le vice-Premier ministre et ministre desAffaires étrangères Pham Binh Minh.
«Ayant biencompris ses forces, les intérêts des puissances, y compris de l’Unionsoviétique et de la Chine et le contexte international à l’époque, leVietnam a décidé de signer les Accords de Genève avec des clauses qui nereflétaient pas toute l’ampleur de sa victoire sur les fronts», a-t-il poursuivi.
Le dirigeant a souligné que «cettedécision est un exemple typique de la leçon retenue par la diplomatievietnamienne en vue de gagner la victoire graduellement. Une victoiregraduelle toutefois basée sur l’objectif principal d’obliger lespuissances à respecter l’indépendance, la souveraineté, l’unité etl’intégrité territoriale du Vietnam. Un pas en avant qui devait aussicréer une nouvelle force et une nouvelle position pour atteindrel’objectif final de libération et de réunification du pays».
Le Vietnam a tiré tous les enseignements de la conférence de Genève,selon le réalisateur français Daniel Roussel. «C’est à cause de laprésence de quatre grandes puissances avec leurs intérêts différents quele Vietnam n’a pas eu totalement satisfaction. C’est pourquoi, pendantla guerre contre les Américains, Hanoi a mené des négociations directesavec Washington, ce qui est illustré par les face-à-face entre ledirigeant Lê Duc Tho et le conseiller Henry Kissinger», a-t-il estimé.
La situation mondiale et régionale tout comme laposition du Vietnam ont bien changé depuis la conférence de Genève. Lapaix, la coopération et le développement sont devenus les directionsprincipales. Le Vietnam poursuit toujours une intégration intense àl’économie internationale et le développement d’une économieindépendante et autonome.
Cependant, les évolutions complexes dans lemonde posent également des défis majeurs en termes de sécurité et dedéveloppement. Le Vietnam doit savoir lier ses propres intérêts à ceux de la paix, de l’indépendance nationale et du progrès social, objectifs communs de nombreux pays du monde. En Mer Orientale, le Vietnam a des droits souverains et des intérêts économiques. L’implantation par la Chine le 2 mai 2014 de la plate-forme Haiyang Shiyou-981 dans la zone économique exclusive et le plateau continental du Vietnam porte atteinte à la souveraineté du Vietnam et menace la liberté et la sécurité de la navigation en Mer Orientale.
Dans ce contexte, le Vietnam est déterminé à défendre sa souveraineté par des mesures pacifiques. Le Vietnam exige de la Chine de s’abstenir d'actes violant sa souveraineté et le droit international. Cette lutte du Vietnam a ainsi deux objectifs, le premier, c’est de défendre sa souveraineté, ses intérêts nationaux légitimes, et le second, c’est de contribuer à assurer la stabilité dans la région, dans l’intérêt commun des pays de la région comme du monde.
Dans une interview accordée à l’agence américaine Bloomberg le 30 mai 2014, le Premier ministre Nguyên Tân Dung a affirmé que «l’indépendance et la souveraineté de la Patrie vietnamienne sont sacrées et inviolables. Nous sommes résolument déterminés à ne pas les sacrifier pour quoi que ce soit. Le Vietnam n’a ménagé aucun effort et ne ménagera aucun effort pour défendre la souveraineté de sa zone maritime par voie des mesures pacifiques».
«Nous vivons dans l’ère d’une mondialisation et d’une intégration économique internationale de plus en plus poussées. Le monde entier forme un marché. Les nations coopèrent toutes en matière économique sur la base du principe d’économie de marché, d’égalité, et d’intérêts réciproques. Il en est de même pour le Vietnam et la Chine», a encore indiqué le chef du gouvernement vietnamien.
«Un autre aspect des relationsinternationales, c’est qu’il n’y a pas d’amis et d’ennemis à vie. En plus, cesdeux facteurs se mêlent parfois. Dans une relation bilatérale oumultilatérale, il y a des aspects de coopération, de partenariat, maisil y a aussi des aspects de lutte pour l’intérêt de chacun. Dans cettemesure, il faut se comporter de manière très souple», a fait remarquerle professeur associé en histoire, Vu Quang Hiên, de l’Université dessciences sociales et humaines de Hanoi.
«Il fauttoujours considérer l’intérêt national comme l’objectif primordial et leprincipe le plus important dans les relations extérieures. Il ne fautjamais sacrifier la souveraineté, l’indépendance et l’intégritéterritoriale, la mer territoriale et l’espace aérien», a-t-il conclu.-VNA