Depuis longtemps, le Don ca tài tu (musique des amateurs) dans le sud du Vietnam est ancré dans la vie culturelle et spirituelle des gens du Sud. Le 5 décembre 2013, l'art du Don ca tài tu (musique et chanson) a été officiellement reconnu comme patrimoine culturel immatériel de l'humanité. C'est aussi la première fois qu'une forme de musique folklorique traditionnelle du Sud est reconnue comme patrimoine mondial.

A la découverte des chansons folkloriques du Sud

En évoquant le Don ca tài tu, les gens pensent souvent à un art populaire unique, «spécialité» du Sud. Les gens du Sud, qu’ils soient riche ou pauvre, homme ou femme, jeune ou vieux peuvent chanter le Don ca tài tu n'importe où et à tout moment. Cet art musical est pratiquée dans les fêtes, dans les jardins de vergers, sur les bateaux, lors des mariages, des funérailles et anniversaires de la mort.

Selon les chercheurs, le Don ca tài tu est apparu à la fin du 19e siècle. Il est issu de la musique de cour de Huê.

Le mot «amateur» dans le Don ca tài tu désigne un artiste qui excelle dans la musique ancienne et a un talent particulier pour jouer des instruments et chanter. Cela ne signifie pas «non professionnel». Cela signifie également que les «amateurs» n’utilisent pas cet art pour gagner leur vie, mais pour s'amuser quand ils sont heureux et personne ne doit payer leurs performances.
 


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Un concert de Don ca tài tu pour les touristes au sein d’un verger dans la
province de Bac Liêu. Photo: Lê Minh

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Un concert de Don ca tài tu lors d’un Festival culturel Hoa (Vietnamiens d’origine chinoise) à Hô Chi Minh-Ville. Photo: Lê Minh

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Instruments du Don ca tài tu: (de gauche à droite) guitare, instrument sên à 3 cordes, luth chinois à
quatre cordes, viole à deux cordes, luth à caisse ronde et à deux cordes,
luth sên à 3 cordes, luth co, cithare à seize cordes. Photo: Lê Minh

Selon le professeur Trân Van Khê qui a consacré toute sa vie à la musique traditionnelle du Vietnam en général et au Don ca tài tu du Sud en particulier, au début du 20e siècle, le Don ca tài tu s'est fortement développé et s'est rapidement propagé à travers le six provinces du Sud. A cette époque, en raison de l'interaction et l'émulation entre les groupes d’amateurs, leurs techniques ont été améliorées et l'enregistrement des anciennes chansons ont été perfectionnés. Beaucoup d'artistes bien connus comme Nguyên Quang Dai (ou Ba Doi) à Long An, Trân Quang Quon (ou Ky Quon à Vinh Long, Môc Quan Nguyên Trong Quyên à Cân Tho, Lê Tài Khi (ou Nhac Khi), le bonze Nguyêt Chiêu à Bac Liêu… ont eu un grand mérite dans la promotion de cet art dans la première moitié du 20e siècle.

Les principaux instruments du Don ca tài tu comprennent le luth en forme de lune, la viole à deux cordes, la cithare à 16 cordes et le monocorde, qui sont connus comme les «quatre grands instruments». En 1930, la guitare, le violon et la guitare hawaïenne ont été ajoutés. Le song loan (percussions) a également été utilisé. Traditionnellement, les instrumentistes jouent rarement en solo, mais font des duos (luth en forme de lune et cithare à 16 cordes) ou trios (luth en forme de lune, cithare à 16 cordes et violon à deux cordes), parfois à la flûte. La partie la plus intéressante du Don ca tài tu est le prélude de l'instrumentiste et les vocalises de la chanteuse pour accorder l'instrument, inspirer l'artiste.

Le Don ca tài tu a un large répertoire, avec 20 grandes chansons appelées « Nhi thâp huyên tô ban » pour quatre rythmes, dont six chansons Bac exprimant la joie et l'ouverture d'esprit, sept chansons Ha utilisés dans les rituels, trois chansons Nam exprimant la douce oisiveté et l'élégance et quatre chansons Oan pour les scènes de tristesse, de chagrin et de séparation. En outre, il y a huit chansons Ngu, dix chansons sans interruption, de nombreuses variantes et de nouvelles chansons composées par des artistes de talent.

Une forte vitalité du Don ca tài tu
Contrairement à de nombreux types de chansons folkloriques, le Don ca tài tu a une forte vitalité. Non seulement les gens du pays, mais aussi les touristes étrangers qui visitent le Vietnam aiment cet art en raison de ses caractéristiques rustiques, familières, romantiques et uniques.

En 1963, le Professeur Trân Van Khê, il a demandé au compositeur Nguyên Huu Ba d’enregistrer un disque de Don ca tài tu pour le présenter à l'UNESCO. En 1972, il a envoyé à l'UNESCO un deuxième disque, de lui et du professeur de musique Vinh Bao. La Radio Cocora de France a invité le professeur Trân Van Khê, le professeur de musique Vinh Bao (en 1972) et l'artiste de cithare à 16 cordes Hai Phuong (en 1994) pour enregistrer deux autres disques qui ont été répertoriés dans les meilleures ventes d'albums en France et ont été reçu le prix de la critique musicale de l'année.

Nous sommes arrivés dans la province de Bac Liêu, une région où le mouvement de Don ca tai tu se développe le plus dans le sud. C’est aussi la terre natale du compositeur Cao Van Lâu, auteur de la chanson « Da cô hoài lang » (chanson exprimant le sentiment intime de nuit d’une femme en l’absence de son mari).
 
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Le Festival de Don ca tài tu City de Hô Chi Minh-Ville 2011 a attiré 126 artistes venus
des clubs de la ville et des provinces du Sud. Photo: Lê Minh

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Les artistes Hoàng Long - Thanh Thao (Centre culturel du district de Cu Chi, Hô Chi Minh-Ville)
lors du festival 2011. Photo: Lê Minh

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Le Prof. Trân Van Khê à Hô Chi Minh-Ville. Photo: Lê Minh

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Lors du Festival 2011. Photo: Lê Minh

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Offre d’encens en mémoire du compositeur Cao Van Lâu au mémorial de l’art du Don ca tài tu du
Nam Bô (Sud) et du compositeur Cao Van Lâu. Photo: Lê Minh

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Un coin du mémorial de l’art du Don ca tài tu du Nam Bô (Sud) et du compositeur Cao Van Lâu. Photo: Lê Minh

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Visiteurs au mémorial de l’art de Don ca tài tu du Nam Bô (Sud) et du compositeur Cao Van Lâu. Photo: Lê Minh

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Une classe de Don ca tài tu à la Faculté dr Théâtre opéra traditionnel de l'Université d'art
Dramatique et Cinématographique de Hô Chi Minh-Ville. Photo: Lê Minh

À l'heure actuelle, la province dispose de 227 clubs de Don ca tài tu avec 2143 membres, dont 475 instrumentistes et chanteurs 1668. Parmi ces clubs, 55 ont reçu des équipements et des outils de l'État. Chaque année, Bac Liêu organise un Festival du Don ca tài tu, offrant plus de possibilités pour les clubs d’améliorer leurs compétences.

Depuis plus de 10 ans, les provinces de Bac Liêu, Soc Trang et Cà Mau ainsi que quelques provinces du sud-ouest ont organisé chaque année un échange musical contribuant à promouvoir le mouvement du Don ca tài tu.

Selon Nguyên Quôc Minh, directeur du Centre culturel et directeur du Département de la Culture de Bac Liêu, le cours de formation communautaire sur la chanson «Da cô hoài lang» (version standard) et le chantVong cô (air traditionnel mélancolique), organisé par le centre attire un grand nombre de personnes de tous les âges, dont des personnes âgées de plus de 80 ans et des adolescents.

Lê Thi Thu Thao, une jeune fille de 14 ans, a déclaré : «J'aime le Don ca tài tu parce que depuis toute petite, j'ai entendu beaucoup de chansons interprétées par mes parents, mes oncles et tantes, lors des événements familiaux et des fêtes ».

La province de Bac Liêu a été choisie pour accueillir le premier Festival de Don ca tài tu au Vietnam. Le festival aura lieu en avril 2014 sur le thème «Don ca tài tu - la voix intérieure du peuple du Sud».

Selon les dernières statistiques, le mouvement de Don ca tài tu couvre 21 villes et provinces à travers le pays, avec 2.258 clubs et 13.800 membres, dont le plus jeune est âgé de 6 ans et le plus âgé 99 ans.

Outre le fort développement du mouvement dans les provinces et villes du Sud, des investissements importants ont été réalisés pour la recherche et la formation. Hô Chi Minh-Ville est le plus grand centre de formation et de recherche sur le Don ca tài tu. Deux unités peuvent former des artistes professionnels : la Faculté de musique traditionnelle du Conservatoire de Hô Chi Minh et la Faculté du Théâtre opéra traditionnel de l'Université d'art Dramatique et Cinématographique. Il y a aussi beaucoup de cours de Don ca tài tu ouverts par la maison de Culture dans la ville et les districts, et par des artistes.

On peut dire que le Don ca tài tu est «l'âme» du patrimoine culturel du Sud. Une forme d'art qui montre les traits culturels ainsi que la personnalité des gens du Sud (simplicité, générosité), qui soude la communauté./.