L'affaire de Nghi Phuong sous le regard de la religion et de la justice
L'affaire a débuté le 22 mai dernier lorsque le prêtre Dang Huu Nam, en charge de la paroisse de Binh Thuan de la commune de Nghi Thuan, a organisé une prière à l'église de la paroisse-fille de Trai Gao pour des centaines de fidèles venus de plusieurs localités pour soutenir huit personnes devant passer en appel le lendemain dans la ville de Vinh pour "activités subversives contre l'administration".
Les rizières sont
presque mûres, la cloche résonne, la campagne fait peau neuve, mais la
vie paisible régnant depuis des générations ici, dans la commune de Nghi
Phuong, district de Nghi Loc de la province de Nghe An (Centre), a été
récemment perturbée par des extrémistes.
L'affaire a
débuté le 22 mai dernier lorsque le prêtre Dang Huu Nam, en charge de la
paroisse de Binh Thuan de la commune de Nghi Thuan, a organisé une
prière à l'église de la paroisse-fille de Trai Gao pour des centaines de
fidèles venus de plusieurs localités pour soutenir huit personnes
devant passer en appel le lendemain dans la ville de Vinh pour
"activités subversives contre l'administration".
Des
paroissiens ont alors barré la route, frappé et blessé cinq policiers
envoyés sur place pour se renseigner sur la situation, trois d'entre eux
étant séquestrés pendant plus de deux heures. Des centaines de
paroissiens ont investi le domicile de M. Dau Van Son, chef des forces
armées de la commune de Nghi Phuong, brûlé des poulets vivants et
endommagé des biens. A même de constater de visu les blessures de ces
trois policiers, l'évêque Nguyen Thai Hop n'a aucunement tenté de calmer
ses paroissiens, les regardant tranquillement alors qu'ils les
obligeaient à signer un "procès-verbal" dénonçant leur tentative
d'"empêcher les paroissiens de prier".
Le 30 août 2013,
le Comité populaire du district de Nghi Loc et la police de la province
de Nghe An ont invité l'évêque Nguyen Thai Hop à sensibiliser les
paroissiens et à disperser un attroupement autour du siège du Comité
populaire de la commune de Nghi Phuong. "Vous rentrez. Concernant cette
affaire, j'en ai parlé à l'administration qui l'examinera pour
traitement. Cinq jours après, si l'administration ne libère pas les
gens, vous pourrez faire tout ce que vous voudrez. Quant à moi, j'aurai
accompli ma mission", a-t-il déclaré devant 300 personnes.
Dans le cadre de l'enquête préliminaire, les trois policiers violentés
ont été diagnostiqués, le 23 mai au soir, d'une invalidité temporaire
partielle de 20 %. Les pertes matérielles de la famille de Dau Van Son
ont été évaluées à plus de 94 millions de dongs, et sa femme et sa fille
de 4 ans, diagnostiquées en état de choc psychologique.
La police de la province de Nghe An a poursuivi l'enquête préliminaire
pour finalement ouvrir une information des chefs de "trouble à l'ordre
public", "arrestation illégale de personne", "violences volontaires" et
"destruction de biens privés". La police de Nghe An a par ailleurs
interpellé Nguyen Van Hai et Ngo Van Khoi, domiciliés dans la commune de
Nghi Phuong, pour les placer en garde à vue du chef de "troubles à
l'ordre public".
Nguyen Van Hai et Ngo Van Khoi se sont
souvenus avec remords du soir du 23 mai où, avec d'autres catholiques,
ils ont battu et détenu les trois policiers et détruit des biens de Dau
Van Son.
Nguyen Van Hai a reconnu avoir eu tort de crier
"Battez - le à mort !" pour exciter les autres. "Je n'avais pas
réfléchi mais maintenant, j'ai compris que ma mise en examen et ma
détention provisoire sont justifiées. J'espère bénéficier de la clémence
de mes juges", a-t-il déclaré.
Reconnaissant que ses
cris "Battez - le ! Battez - le !" ont poussé les gens à attaquer les
policiers mais aussi les fonctionnaires, Ngo Van Khoi a déclaré dans ses
aveux "mes actes sont illégaux. J'espère bénéficier d'une libération
sous caution et respecterai la loi".
Lors d'une séance de
travail le 1er septembre avec la Police de Nghe An, l'évêque Nguyen
Thai Hop a demandé la libération de ces deux hommes. Le colonel Nguyen
Huu Cau, vice-directeur de la Police provinciale, lui a expliqué que
"l'affaire de Trai Gao est une grave infraction et l'arrestation de ces
deux hommes est justifiée. Si l'évêché accepte de se porter garant, ils
seront libérés sous caution et devront se présenter à première
réquisition". Mais, l'évêque Nguyen Thai Hop et les trois prêtres
l'accompagnant ont refusé, maintenant leur demande de libération sans
conditions.
Le 30 août et les 3 et 4 septembre, des
centaines de catholiques de la paroisse de My Yen et des alentours ont
investi les locaux du Comité populaire de la commune de Nghi Phuong,
brandissant des banderoles et des slogans exigeant la libération de ces
deux hommes. Certains sont même allés occuper le bureau du
vice-président du Comité populaire de la commune, malmenant six
fonctionnaires du district de Nghi Loc et de Nghi Phuong. Ils ont
ensuite obligé le président du Comité populaire de cette commune, M.
Nguyen Trong Tao, à promettre de demander au Comité populaire et à la
Police de la province de Nghe An la libération de Ngo Van Khoi et Nguyen
Van Hai le 4 septembre à 16h. Ils ont aussi contraint le vice-président
du Comité populaire du district de Nghi Loc, M. Nguyen Huu Lam, à
confirmer cette promesse par écrit avant de libérer les six
fonctionnaires.
L'après-midi du 4 septembre, 30
catholiques, dont les épouses de Ngo Van Khoi et de Nguyen Van Hai, sont
revenus dans les locaux du comité populaire pour demander la libération
des deux hommes. A l'extérieur, des centaines de catholiques bloquaient
les locaux, insultant les policiers. Vers 15h30, l'église de la
paroisse de My Yen a brusquement sonné la cloche et des milliers de
personnes sont arrivées au siège du Comité populaire de Nghi Phuong,
certains jetant des pierres, blessant six policiers.
Devant cette situation, les services compétents ont réagi dans le
respect de la loi pour disperser la foule et éviter tout acte
extrémiste. En même temps, l'arrivée de prêtres a permis de calmer les
gens et la situation s'est améliorée. A 19h, tous étaient rentrés chez
eux.
Sur la base des résultats de l'enquête
préliminaire, le service de police judiciaire de la Police de Nghe An a
ouvert le 7 septembre une information des chefs de "troubles à l'ordre
public", "rétention illégale de personne" et "obstruction à personne
dans l'exercice de ses fonctions publiques", avec placement en détention
provisoire de Ngo Van Khoi et de Nguyen Van Hai.
Le
colonel Nguyen Huu Cau a annoncé que toutes personnes directement
impliquées dans ces délits et se présentant spontanément à la Police
seront autorisées à rentrer à leur domicile et, qu'en cas contraire,
l'information sera poursuivie et des poursuites judiciaires engagées.
La commune de Nghi Phuong compte 54 % de foyers catholiques. Appliquant
les préconisations du Parti et de l'Etat en matière de développement
socioéconomique, les autorités locales ont pris nombre de mesures afin
d'améliorer la vie de la population, donnant des conditions favorables
aux catholiques pour développer leurs activités économiques et mener une
vie religieuse et civique.
Comme Nghi Phuong, la
commune de Yen Thanh figure actuellement dans la liste des communes les
plus riches de Nghe An avec des centaines de milliardaires, dont de
nombreux catholiques, et dans le hameau 3 de la commune de Nam Loc, le
nombre de foyers pauvres est de seulement 10, au lieu de la moitié en
2007. La physionomie de ces zones rurales a beaucoup changé ces
dernières années.
C'est pourquoi l'affaire de la paroisse
de My Yen a causé une vague d'indignation parmi les Vietnamiens, qu'ils
soient pratiquants d'une religion ou non.
Le
vice-président du Comité populaire de la province de Nghe An, M. Thai
Van Hang, a affirmé que dans l'histoire nationale, les catholiques ont
considérablement contribué à la défense comme à l'édification du pays,
en particulier à Nghe An. Ces troubles de l'ordre public dans la
paroisse-fille de Trai Gao sont survenus du fait de certaines de
personnes qui, faute de connaissances de la loi, ont été incitées à
commettre ces actes par des organisations et individus de l'intérieur
comme de l'extérieur du pays, avec le soutien de dignitaires religieux.
-VNA