La "qua tang" – un rite initiatique des Dao Khau
Le rite
initiatique, on le trouve dans de très nombreux groupes ethniques, en
ce compris au Vietnam, chez les Muong, les Tày ou les San Chay par
exemple... Mais seuls ceux qui veulent devenir maîtres des rites doivent
s’y soumettre. Chez les Dao Khau, notamment, tous les adolescents sont
obligés de passer par là. Sinon, pas de mariage possible !
Quand les jeunes garçons arrivent à l’âge propice, une cérémonie est
organisée : la "qua tang". Cet âge n’est pas le même partout. Pour les
Dao Rouges, il se situe entre 12 et… 30 ans ! Chez les Dao à tunique,
c’est entre 11 et 19 ans. Et chez les Dao aux sapèques, seuls les hommes
mariés sont concernés. Mais ce sont les Dao Khau qui semblent les plus
précoces, puisqu'ils se considèrent parvenus à l’âge adulte à 11 ou 12
ans.
"Les Dao Khâu estiment qu’un garçon est adulte
lorsqu’il a atteint 11 ou 12 ans et qu’il a subi tous les rites
initiatiques", dit Tẩn La U, du musée d’Ethnographie de Lai Châu. Ils
l’intègrent alors pleinement dans la communauté. S’il ne s’est pas
soumis à ces rites, il ne pourra pas retrouver ses ancêtres après sa
mort et il faudra organiser une petite cérémonie supplémentaire le jour
de ses funérailles".
Autre règle à laquelle personne ne
peut déroger : pas de "qua tang", pas de mariage ! Tan Kim Phu, du
district de Sìn Hồ, un district rattaché à la province montagneuse de
Lai Châu, raconte : "C’est une règle pour tous les garçons ! Après la
cérémonie, ceux qui sont capables de devenir maîtres des rites seront
reconnus officiellement et pourront exercer le métier. Sinon, mêmes les
meilleurs sont recalés ! ".
Le jour de la cérémonie est
une véritable festivité. Tout le hameau se rend chez le garçon qui va
passer à "l’âge d’adulte" pour le féliciter, mais aussi pour le festin
qui accompagne l’évènement. Il faut savoir qu’un "qua tang" est très
coûteux et nécessite plusieurs jours de préparation. "Il convient de
choisir un jour ou une heure faste", dit Tan Kim Phu. Mais surtout, il
faut préparer un vrai festin, en tuant une bonne dizaine de cochons,
afin de régaler les invités et le maître des rites. La tradition veut
qu’un vrai banquet dure pendant les deux ou trois jours qui suivent la
cérémonie, laquelle consiste en une série de rites importants et
complexes.
Eh oui, le garçon pour qui est organisée la
cérémonie, mais aussi les participants, sont invités à respecter une
multitude de règles et de tabous : bien laver son corps, faire la
charité, s’abstenir de manger de la viande, de tuer des animaux ou
d’avoir des relations sexuelles.
"Tous les invités,
hommes ou femmes confondus, doivent respecter les règles ancestrales. Il
faut éviter les gros mots et mener un mode de vie ascétique dès les
jours qui précèdent", fait savoir Tan Kim Phu.
La famille
du garçon doit inviter un maître des rites. Le garçon - le héros de la
cérémonie - est conduit devant l’autel principal. Puis, il doit "tomber"
dans un filet minutieusement préparé, signe marquant sa "maturité". "Le
filet est tressé comme une toile d’araignée et soutenu par trois ou
quatre personnes", indique Vi Văn An, ethnologue, ajoutant qu'après le
rituel du filet, le garçon mange un peu. Ensuite, c’est le rituel des
lampes de culte.
La cérémonie est ponctuée de musiques et de danses rituelles, des arts dans lesquels les Dao excellent. -VOV/VNA