La ferme aux serpents de Dông Tâm, dans le delta du Mékong, abrite un bestiaire à écailles mais aussi à poils digne de l’Arche de Noé. Un lieu rare, à la triple vocation: touristique, pédagogique et scientifique.

Distant de 9 km de la ville de My Tho, le Centre d’élevage, de culture, d’étude et de préparation de produits pharmaceutiques de la 9e Région militaire ou, plus prosaïquement «Ferme aux serpents de Dông Tâm», s’étend sur plus de 40 ha dans la commune de Phuoc Thanh, province de Tiên Giang.

Il y a 30 ans, à sa création, il avait comme mission d’élever des serpents à des fins médicales. Puis, au fil des années, Dông Tâm a élargi sa sphère d’activités pour devenir un parc zoologique, sans sacrifier, bien au contraire, sa vocation première. Chaque année, il accueille de 30.000 à 40.000 visiteurs, tant vietnamiens qu’étrangers.

La visite commence par un espace d’exposition de centaines d’espèces de reptiles conservées dans le formol. Une vue globale sur la plupart des espèces vivant au Vietnam, avec des renseignements sur leur vie, leur biologie... Parmi les visiteurs attentifs figurent bon nombre de chercheurs et d’étudiants.

Après cette entrée en matière plutôt alléchante, les visiteurs entrent dans le vif du sujet avec le pompeusement nommé «Espace fonctionnel», qui abrite des animaux vivants. Trente hectares d’espaces verts et de plans d’eau, où vivent, dans des conditions proches de leur habitat naturel, toutes sortes de créatures à poils ou à écailles, réparties selon leurs affinités culinaires, écologiques ou compatibilités d’humeur. Les grandes vedettes sont les serpents. Une des plus belles collections en Asie du Sud-Est, disent certains, avec des centaines d’espèces venues de tous les coins du pays. Les espèces venimeuses comme mocassins, bungares, cobras, crotales, côtoient des espèces plus pacifiques comme couleuvres, typhlops ou python... Le plus gros des pensionnaires est un mocassin de 18 kg.

Le grand moment de frisson pour les visiteurs, c’est lorsqu’un technicien entre dans l’enclos, saisit prestement une vipère derrière la tête, et la fait mordre un flacon pour extraire le venin. Vert de rage, le reptile s’enroule autour de son bras, sous les cris d’effroi des jeunes visiteurs. «Le venin sert à la préparation de certains médicaments, dont des sérums antivenimeux», explique-t-il calmement, tout en tenant fermement entre le pouce et l’index le cou palpitant du serpent.

Quittant le «paradis» des serpents, les visiteurs peuvent ensuite découvrir de plus habituels pensionnaires des zoos tels que crocodiles, singes, ours, tigres, panthères... Sur le sable, au bord d’un lac, une dizaine d’alligators font «bronzette» la gueule béante, présentant aux visiteurs ébahis leurs belles rangées de canines. Des macaques espiègles viennent quémander - éventuellement chiper si l’occasion se présente - de quoi manger, tandis que les porcs-épics restent à distance et présentent à l’importun leur dos couvert d’épines.

Le zoo est flanqué d’un jardin botanique de 11 ha où sont conservées des espèces précieuses, dont des plantes médicinales. Selon le médecin Vu Ngoc Luong, directeur adjoint du Centre d’élevage, de culture, d’études et de préparation des produits pharmaceutiques de la 9e Région militaire, ce dernier dispose d’un fort contingent de chercheurs en médecine traditionnelle qui ont réussi à préparer des recettes efficaces, notamment contre les morsures de serpents. En 2005, l’État a investi 10 milliards de dôngs pour construire ici une clinique moderne spécialisée dans le traitement des morsures de serpent. Elle traite chaque année 500 cas, gratuitement.

Enfin, la visite se termine par «le secteur des services» où les visiteurs peuvent acheter divers produits de médecine traditionnelle, par exemple des onguents à base de python. Beaucoup ne résistent pas à la tentation d’un bon repas de spécialités culinaires locales. Au menu : gobies, crabes de rizière, fleurs de nénuphar et.... viande de serpent. Paradis ? Pas si sûr... – AVI