Quand les zostérops jouent les stars à Hanoi
Un zostérops est à peine plus gros que le pouce
mais peut se vendre 100 millions de dôngs (5.000 dollars). Bref, pas
vraiment un loisir d’ouvrier...
Les passionnés de cet oiseau
de couleur verdâtre ont deux lieux de rendez-vous : le café au
carrefour des rues Nguyên Du-Trân Binh Trong (au bord du lac Thiên
Quang) et le jardin botanique. Ils viennent avec leur cage enveloppée
d’une toile rouge, et la suspendent à 2 m du sol. Tout en sirotant leur
café, ils discutent des qualités de chanteur de tel ou tel oiseau, et
fixent le jour où se déroulera le prochain concours.
Nous avons
rencontré Dung «dzô», fier propriétaire d’un zostérops de 65 millions de
dôngs, qui s’ébat dans une superbe cage de 12 millions de dôngs. « Mon
oiseau ne fait même pas partie des dix plus chers que l’on trouve ici ,
explique-t-il. Pour nous, ce loisir permet aussi de montrer son
statut social. En regardant le zostérops, on devine qui est le
propriétaire».
À peine a-t-il terminé sa phrase qu’un
jeune de grande taille débarque sur une moto de luxe de marque SH, une
cage à la main. Tout le monde se tait et le regarde avec envie. « C’est
Thành «Hàng Dâu», son zostérops vaut plus de 100 millions de dôngs !
», nous assure Dung.
Nguyên Huu Thai, 35 ans est aussi un
amoureux de ces oiseaux. « Je fais partie aussi des passionnés. Mais
les jeunes qui viennent ici achètent des oiseaux dont je n’oserais même
pas rêver. Quarante millions de dôngs, c’est pour moi le grand maximum,
dit-il. Avant, du temps de mon grand- père puis de mon père,
posséder un garrulaxe de Chine, c’était un bien précieux. Maintenant,
c’est le tour des zostérops dont chacun se négocie des dizaines de
millions de dôngs».
À bichonner comme sa femme
Selon
Nguyên Huu Thai, « élever des oiseaux permet de se relaxer après une
journée de travail. C’est un hobby sain, distingué, qui exige de la
patience et de la minutie. Des traits de caractère que tous les jeunes
n’ont pas…». Pour qu’un oiseau soit primé dans un concours, son
propriétaire doit l’entraîner minutieusement... « et le bichonner...
comme sa femme », ajoute Nguyên Huu Thai. Sélectionner un oiseau de
qualité, ce n’est pas facile. « Parmi des centaines d’oiseaux passés au
crible, les experts n’en trouvent qu’un seul de vraiment exceptionnel
», assure-t-il. En général, les gens expérimentés préfèrent les mâles,
qui se distinguent des femelles par un plumage plus clair, de grands
yeux, une tête un peu ronde, un long cou, un bec droit, un corps
allongé... En ce qui concerne l’alimentation, l’idéal est un mélange
d’insectes, de fruits et de pollen, sa nourriture lorsqu’il vit à l’état
sauvage. Mais pour des raisons pratiques, on le remplace par du son
spécial mélangé à du jaune d’oeuf, des haricots verts et d’autres
substances. L’oiseau est fragile et doit donc être placé dans un abri
sûr. Sinon, on risque de voir s’envoler des dizaines de millions de
dôngs...
En plus de l’oiseau, les passionnés investissent
aussi dans la cage et la mangeoire. Il y a des cages en bambou mais
aussi en nacre, en ivoire, en écailles de tortue... qui atteignent
parfois des centaines de millions de dôngs. Et pas question de mettre un
oiseau de cent millions de dôngs dans une cage en vulgaire bambou ! «
Un oiseau de haute valeur doit vivre dans une cage de luxe, c’est comme
cela qu’il donnera le maximum de ses capacités» , considère Nguyên Huu
Thai.
Chaque mois, ces passionnés organisent des concours.
L’oiseau gagnant peut rapporter gros à son propriétaire - s’il décide de
le vendre -, et surtout un sentiment d’immense fierté... - VNA