Une bonne centaine de maisonssur pilotis sont accrochées aux flancs de la montagne qui entourent lehameau de Ha Thành. Mais c’est surtout à un certain art de vivreancestral qu’elles sont accrochées, ces maisons !... Nguyen Thi Dien ahérité la sienne de ses parents et, visiblement, elle y est aussisolidement attachée que le sont les pilotis qui supportent l’édifice àla montagne. « On vient tout juste de la remettre en état. Les voisinssont venus prêter main forte. Normal, ici, on forme une communautésolidaire !... »
Il faut dire que chez les Tây, unemaison sur pilotis, ça se mérite, et que pour un arbre, devenir lepiloti ou le plancher d’une maison Tây, ça se mérite aussi. Plusieursannées sont parfois nécessaires avant de dénicher l’arbre idoine,exactement comme en lutherie. Nguyen Thi Hoè, une autre Tày du hameau deHa Thành :
« Ça m’a pris une bonne dizaine d’années pour rassemblertous les troncs d’arbres nécessaire à la construction. Les piliers, enparticulier, sont façonnés dans des bois très précieux ».
Chez les Tày, pas question d’utiliser des clous ou du ciment. Du bois,rien que du bois ! Toutes les parties sont assemblées entre elles par unsystème d’embrèvement - tenons-mortaises, si vous préférez - des plusrésistants. La toiture, en pente, est souvent recouverte de paille ou defeuilles de latanier. Nguyen Thi Hoè, encore : « Il faut des milliersde feuilles de latanier pour recouvrir une toiture ! Parfois, on passedeux ou trois jours, juste pour la cueillette. Mais ici, la solidaritéjoue à plein. Si quelqu’un a besoin de se construire une maison, le chefdu hameau l’annonce et tout le monde vient donner un coup de main.C’est la tradition, de travailler tous ensemble ! En tout cas, pour lestoitures, les feuilles de latanier, c’est ce qu’il y a de mieux ! Çaprotège des pluies verglaçantes ! ».
A l’intérieurdes maisons, l’espace est divisé en plusieurs travées, sans pour autantqu’il y ait de cloisons. La travée centrale est réservée comme il sedoit à l’autel des ancêtres. Les travées latérales, elles, n’ont pas defonction précise, faute peut-être d’être précisément délimitées. NguyenThi Hoè, toujours : « C’est un espace ouvert. Il n’y a pas de chambre àcoucher à proprement parler. Lorsqu’on veut se coucher, on crée unesorte d’alcove en suspendant des rideaux. Ce qui est bien dans cecas-là, c’est qu’on ne peut pas être vu tout en pouvant observer ce quise passe à l’extérieur ».
Les maisons sur pilotis des Tâyne diffèrent pas de celles des autres ethnies en ceci que le plancherest situé à deux mètres du sol, histoire de se prémunir de visiteursindésirables : tigres, serpents ou autres reptiles… Et l’espace ainsicréé au-dessous du plancher constitue une sorte de dépôt ou d’abriréservé aux animaux domestiques.
Si les Mong ou les Thaïont au moins deux escaliers, les Tày n’en ont qu’un, à l’entréeprincipale. Par contre, ils font 9 marches, ces escaliers, et il n’estpas question d’en manquer une. Il faut dire que le 9 est un chiffrefaste, censé apporter bonheur et fécondité à toute la maisonnée.-VOV/VNA