Art musical aux racines à la fois érudites et populaires, le đờn ca tài tử (chant des amateurs) est un élément indispensable de l’activité spirituelle et du patrimoine culturel d’une vingtaine de villes et provinces du Vietnam.

Le chant des amateurs est un art vocal apparu vers la fin du XIXe siècle au Sud. Il a connu un bel essor depuis le début du XXe siècle. La musique et les chansons font écho au mode de vie et au travail dans les champs et les rivières. Les interprètes expriment des émotions et des sentiments en improvisant, en ornementant et en faisant des variations sur la structure mélodique et les principaux motifs rythmiques des morceaux.

Le đờn ca tài tử est interprété sur une grande variété d’instruments traditionnels différents, dont le luth en forme de lune, le violon à deux cordes, la cithare à seize cordes, le luth en forme de poire, l’instrument à percussion, le monocorde et la flûte en bambou. Son répertoire est basé sur 20 chansons principales et 72 chansons classiques. Le đờn ca tài tử se transmet oralement, par imitation, des maîtres aux étudiants.

Espace d’interprétation illimité

Le Don ca tài tu du Nam bo (Sud), ou chant des amateurs, a été créé sur la base d'éléments de la nha nhac (musique de Cour), d'airs et de chansons folkloriques du Centre et du Sud. Art musical aux racines à la fois érudites et populaires, le Don ca tài tu est un élément indispensable de l’activité spirituelle et du patrimoine culturel de la population du Sud du Vietnam. Figurant au rang des arts populaires, c’est un «met spirituel» de la population locale depuis des lustres et une des spécificités culturelles du Sud.

Figurant au rang des arts populaires, le chant des amateurs est un met spirituel de la population du Sud depuis des lustres
Outre l’attractivité dans les mélodies, la popularité de cet art s’explique par les espaces d’interprétation commodes. En effet, le chant des amateurs peut être interprété partout, à n’importe quel moment, lors des soirées de pleine lune d’automne, en plein soleil ou à midi sur les rizières, lors des festivals, des célébrations, des mariages ou des rituels d’anniversaires de décès.

D’après le professeur Trân Van Khê : « La particularité du chant des amateurs réside dans l’harmonisation et la proximité entre les chanteurs et les spectateurs, ce qui permet de donner sa vitalité à cet art ».

Dans la réalité, le Don ca tài tu est plus ou moins connu dans le monde. Pendant le début des années 1960, le Pr. Trân Van Khê a présenté un CD sur l’art du chant des amateurs à l’UNESCO. Ensuite, un autre opus intitulé "Vietnam traditions of the South" (Les traditions vietnamiennes du Sud) de l’artiste Bach Huê, composé de 11 chansons de ce type, a été publié dans le cadre d’un recueil de l’UNESCO. Le chant des amateurs du Vietnam a été présenté dans de nombreux pays comme la France, les États-Unis, la République de Corée, le Japon... dans le cadre des programmes d’échanges culturels.

Les efforts de conservation

Ces dernières années, conscient de sa valeur culturelle, l’État a réservé un budget pour les activités de préservation de cet art. Selon les statistiques, entre 2006 et 2013, l’État a consacré plus d’un milliard de dôngs aux projets de recensement et de préservation de cet art.

Vingt-et-une villes et provinces du Sud cherchent à valoriser cet art traditionnel. Le secteur touristique est un précurseur dans la mesure où cette musique et ses représentations sont devenues un produit touristique très original, passionnant nombre de visiteurs vietnamiens comme étrangers. Depuis mi-2011, suite aux demandes insistantes des touristes et habitants locaux, la province de Kiên Giang a appelé à l'ouverture de clubs de đờn ca tài tử. Selon les statistiques, la province en compte aujourd’hui 184, dont une dizaine sur l’île de Phu Quôc. Lors de chaque spectacle, les touristes, eux aussi, sont conviés à y participer s’ils le désirent. Une interactivité qui séduit.

À Hanoi, les touristes peuvent découvrir également cette musique au cœur de la capitale, car depuis 2012, chaque samedi, de nombreux passionnés se retrouvent le soir au Centre des banquets et des conférences Thanh Công (au 22, rue Thành Công, arrondissement de Ba Dinh, Hanoi) pour s’imprégner de cet art interprété par des pointures du genre. Ce programme ayant pour titre “L’espace du Sud” propose à ses partisans les scènes les plus originales que le đờn ca tài tử ait à proposer.

En août dernier, un groupe de scénaristes vietnamiens et français a achevé le scénario d’un film sur cet art. Ce sera le premier projet cinématographique consacré au chant des amateurs. Le film tourne autour de la vie d’un chanteur-instrumentiste fondateur d’un club de đờn ca tài tử dans la province de Tiên Giang pendant les années 1990 et de la participation des artistes à une foire mondiale organisée à Paris à l’époque. Actuellement, l’équipe de ce projet est à la recherche de financements. -VNA