L'officier ayant capturé avec son régiment, il y a 35 ans, le président du régime fantoche de Saïgon et son cabinet, a partagé ses souvenirs sur un évenement qui a débouché sur la libération totale du Sud et la réunification du pays.

Bien que la guerre soit terminée depuis 35 ans, les images de la campagne Ho Chi Minh, l'attaque contre le Palais de l'Indépendance ainsi que l'arrestation du président Duong Van Minh et de son cabinet sont gravées dans la mémoire de chaque combattant du régiment 66, de la division 304, comme un souvenir inoubliable.

“Vous êtes faits prisonniers. Vous devez déclarer sans condition votre reddition. Pas question de passation des pouvoirs”, s'est rappelé avec émotion le général de division Pham Xuan The, ancien commandant de la 1ère Zone militaire, son face-à-face et ses paroles percutantes avec le président de l’administration de Saïgon, Duong Van Minh, le 30 avril 1975.

Lors de la campagne Ho Chi Minh, le régiment 66, partie du corps d’armée N°2, s'est vu confier la tâche de faire des incursions dans l'aile est du front, de pénétrer dans la ville intra - muros puis d'occuper le Palais de l’Indépendance, les sièges de la Radio et du commandement des forces navales.

Le 29 avril 1975 à 23 heures, son corps de troupes s'est engagé sur l'autoroute de Dong Nai, et s'est dirigé vers Saïgon. Le 30 avril, de très bonne heure, il a traversé le pont Saïgon où les forces de l'Armée du régime de Saïgon ont défendu avec acharnement, avec l'appui de chars et des forces d’infanterie et navales. Elles ont tiré sur l'unité du général Pham Xuan The de l'autre côté du fleuve, qui a dû s'arrêter et riposter. 40 minutes après, le combat était terminé. Les soldats du général The avaient détruit plusieurs blockhaus, quatre chars M41 et véhicules blindés et deux navires de guerre sur le fleuve. Durant les échanges de tirs, Ngô Van Nho, chef de bataillon de tanks relevant de la brigade 203, qui dirigeait le combat et certains éclaireurs sont tombés.

L'unité du général Pham Xuan The a poursuivi sa route vers le centre de Saïgon, laissant derrière les chars de l'ennemi en feu.

Assis sur une Jeep, son "butin" obtenu sur le champ de bataille à l’aéroport de Da Nang (Centre), Pham Xuan The qui était alors capitaine et sous-chef du régiment 66, et cinq de ses soldats, ont poursuivi leur route vers le coeur de la ville.

L’arrestation du président Duong Van Minh et du cabinet de l'administration de Saïgon le 30 avril 1975 reste pour le capitaine Pham Xuan The et ses cinq compagnons d'armes une grande surprise.

"Les chars et véhicules des forces de libération ont foncé à tout allure en direction du Palais de l’Indépendance. Le premier char s'est précipité vers la grille d’entrée et s'est arrêté. Le deuxième l'a dépassé puis a défoncé la grille, suivi de près par ma Jeep qui s'est arrêtée au pied du palais, devant le hall d'entrée".

"Je me suis précipité vers le palais pour accrocher le drapeau, ne sachant pas que le cabinet de Duong Van Minh s'y trouvait réuni au grand complet en présence de plusieurs journalistes étrangers", a-t-il confié. Arrivé au premier étage, j'ai rencontré un homme qui s'est présenté comme le “lieutenant général Nguyên Huu Hanh, assistant du président Duong Van Minh”. “Tous les membres du cabinet de Duong Van Minh sont présents dans la salle de réunion. Je vous prie d'entrer, me dit-il”.

Surpris, le sous-chef du régiment 66 Pham Xuan The s'est arrêté, son intention de planter le drapeau a disparu. Il a décidé d'aller rencontrer le président Duong Van Minh et son cabinet.

"Après la présentation du lieutenant général Nguyen Huu Hanh, le président Duong Van Minh s'approche de moi et m'a dit : J'ai appris que les forces de libération étaient en train d’attaquer l'intra-muros. Je les attends pour procéder à la passation des pouvoirs".

Une pensée lui est venue en tête et il lui a répondu immédiatement : “Vous êtes faits prisonniers. Vous devez déclarer votre capitulation sans condition. Pas question d'une passation des pouvoirs”.

A la Radio, Duong Van Minh a fait une brève déclaration: "Moi, général Duong Van Minh, président de l’administration de Saïgon, déclare me rendre sans condition devant les forces de libération du Sud Vietnam. J'ordonne aux autorités de tous les échelons de se disperser, de remettre le pouvoir, du ressort central à celui local, au gouvernement révolutionnaire provisoire de la République du Vietnam du Sud", a-t-il raconté.

Cette brève déclaration a été diffusée sur les ondes de radio, a dit Nguyen Van The.

"Sai Gon ce jour-là a été animée par de nombreux coups de feu mais ce n'étaient que ceux des forces de libération qui fêtaient leur victoire", a conclu avec émotion le général Pham Xuan The.-AVI