À Hanoi, un collectionneur dans l’ère du temps
Dans une petite maison d’environ 20 m², située au 2, rue Ta Hiên. Que
de ventilateurs, objet de toutes les attentions. Cet appareil,
indispensable sous les tropiques, est étroitement attaché à la vie du
propriétaire, Trân Công Phúc. Au fil des années, l’artisan septuagénaire
du vieux quartier de Hanoi en a amassé une collection de plus de 200,
la plus belle du pays sans conteste.
Au détour du hasard
Avant de s'intéresser aux vieux ventilateurs, le jeune Phúc a
travaillé pendant 15 ans dans les chemins de fer où il était soudeur. Il
a appris lui-même la mécanique avec l'aide de ses amis et de quelques
ouvrages.
Il y a une vingtaine d’années, il a
commencé à aider ses voisins à réparer leurs appareils, indispensables
lorsque la chaleur de Hanoi s’abat sur ses habitants. Puis, la
bouche-à-oreille aidant, les gens sont revenus, ont parlé autour d’eux
du fameux réparateur, ainsi a-t-il ouvert son propre atelier.
Un jour, un proche parent travaillant à l’hôtel Metropole, à Hanoi,
l’a informé qu’il s’apprêtait à liquider ses vieux stocks. M. Phúc a
réussi à mettre la main sur l’un de ces ventilateurs, un Marelli, une
marque italienne, de plus de 80 ans, en mauvais état. À force de
persévérance, il est parvenu à lui redonner une seconde jeunesse. Il l’a
exposé dans son atelier. Par hasard, un touriste britannique lui a un
jour proposé de le racheter à prix élevé. L’affaire a donc été conclue,
pour un taël d’or de l’époque. C’est ainsi que cet homme a commencé à
avoir un faible pour la collection et la restauration de ces vieux
engins.
Un précieux «tas de ferraille»
Au début, Trân Công Phúc se fournissait chez les chiffonniers de la
rue La Thành (Hanoi). Sous les mains habiles de l’artisan, nombre de ces
«tas de ferraille» ont été transformés en produits de grande valeur.
Les vieux ventilateurs abîmés ont été remis en état de marche.
Le septuagénaire ne se rappelle pas combien d’appareils lui sont
passés entre les mains, mais il les chérit comme des enfants parce que,
selon lui, «chacun possède sa propre histoire, comme n’importe quel être
humain».
Certains le considèrent comme un homme du
passé. Car dans sa rue du centre-ville, alors que toutes les boutiques
se sont tournées vers le tourisme, lui seul continue son petit
artisanat. Ses clients sont essentiellement des étrangers. Ils sont
prêts à débourser des milliers de dollars pour acquérir un vieux
ventilateur de valeur. Mais M. Phúc ne vend pas tout son musée. Il en
garde pour son propre compte. «Je n’ai jamais eu l’intention de monter
cette collection. Je suis d’abord un passionné. J’en ai restauré
beaucoup. Les uns ont été vendus, mais les autres sont devenus des
membres de la famille, des décennies en arrière. Quand je me sépare d’un
ventilateur, je ressens toujours un petit pincement au coeur», dit-il.
Recordman national
La
collection de Trân Công Phúc est surtout constituée de ventilateurs
Marelli (Italie). Viennent ensuite les Emi (Pays-Bas), Eon et Calor
(France), ainsi que des appareils russes et japonais importés du Sud
avant 1975. Une riche compilation qui lui a valu une inscription au
Livre des records du Vietnam en mai 2012.
Fin mars
dernier, un petit livre lui a également été consacré : Trân Công Phúc -
Roi des vieux ventilateurs de la capitale Hanoi, publié par les Éditions
Công an nhân dân (Police populaire).
«J’aime les
réparer, mais j’apprécie surtout de leur redonner leur éclat d’antan»,
partage l’homme. Il ajoute que sa collection lui a permis faire des
rencontres qu’il n’aurait jamais pu faire autrement. - VNA