Viens chez moi, j’habite au village de poterie de Thô Hà
Comme tant d’autres
villages, Thô Hà a subi les vicissitudes de la modernité : ses clients
se sont détournés de ses produits traditionnels au profit de céramiques
modernes, plus durables et moins coûteuses. Aujourd’hui, le village est
spécialisé dans la fabrication de nouilles et de galettes de riz, dont
on peut suivre l’entier processus en visitant le village.
Selon les annales historiques du village, entre la fin de la dynastie
des Ly (1009-1225) et le début de celle des Trân (1226-1400), le
mandarin Dào Tiên Tri (issu du village de Thô Hà) et deux autres, l’un
provenant du village de Bat Tràng et l’autre du village de Phù Lang,
effectuèrent une mission royale en Chine.
À leur
retour, ils transférèrent aux villageois de leur terre natale les
méthodes de fabrication des céramiques acquises lors de leur séjour. Le
village de Thô Hà se spécialisait alors dans les céramiques
caractérisées à l’émail brun rouge de couleur naturelle, alors que Bat
Tràng et Phù Lang se concentraient respectivement dans les céramiques à
l’émail blanc et jaune.
Une fierté du passé
D’après les artisans âgés, Thô Hà a vu son métier traditionnel et son
commerce prospérer du XIVe siècle à la fin des années 1950. Sa
réputation résidait dans la qualité de ses céramiques très résistantes à
l’eau, solides sinon éternelles, dans leur résonance de cloche et leur
émail brun rouge. Les céramiques traditionnelles de Thô Hà sont des
faïences, réalisées à partir d’une pâte très spécifique. Durant la
cuisson, ces pâtes produisent naturellement une sorte d’émail de couleur
brun rouge. Ce n’est pas un hasard si les jarres, bocaux et autres
flacons à usage courant signés Thô Hà sont le choix de prédilection des
familles pour conserver les aliments et les liquides.
Si le village de Bat Tràng a maintenu sa tradition, on ne peut hélas
pas en dire autant de Thô Hà. D’après les anciens artisans du village,
c’est à partir des années 1980 que cette activité a périclité. Les
villageois, rencontrant des difficultés pour écouler leurs produits, ont
commencé à abandonner ce métier ancestral qui s’est ensuite totalement
perdu.
Aujourd’hui, l’histoire de Thô Hà n’est plus
visible qu’à travers les toits, les murs, la porte du village, la
maison communale, tous composés de céramiques. L’espoir de voir cette
activité renaître telle le Phénix de ses cendres subsiste encore,
certaines personnes souhaitant revenir à leur métier traditionnel et
refusant de mettre un point final à cette tradition perdue, à l’instar
de cette famille qui a monté un petit atelier et a sorti ses premiers
produits. – VNA