Petite histoire de la lecture au Vietnam
Avec l’explosion de nouvelles technologies, l’homme mondialisé est
devenu accro à ses appareils numériques et électroniques. Entre iclics
et igames, il trouve encore le temps de s’adonner à des loisirs mais la
lecture n’y a plus sa place. Le phénomène est loin d’être nouveau. Si
auparavant, le livre était sa première source d’informations, il dispose
aujourd’hui de moins en moins de temps et de nombreux moyens pour
s’informer : télévision, cinéma, et surtout Internet. Laissant peu à peu
de côté le support papier.
Selon Nguyên Quang
Thach, créateur du projet «Bibliothèques rurales » en 2011, «les paysans
ne lisent presque pas. Ce constat est relativement logique quand on
sait que les étudiants eux-mêmes ne le font pas».
Des facteurs historiques
Toutefois, l’argument facile de la mondialisation ne suffit pas. Les
derniers sondages ont montré que les Vietnamiens n’avaient pas cette
culture de la lecture.
Depuis la fondation de la
nation jusqu’au XIXe siècle, le caractère chinois était le seul moyen de
transmission de l’information. Cependant, à l’époque, une grande partie
de la population était analphabète. D’ailleurs, certains de nos
ancêtres les ont appris pour devenir mandarins, non pour écrire les
livres. Et s’ils avaient rédigé des ouvrages, seuls les mandarins s’y
seraient intéressés.
Depuis le milieu du XIXe
siècle, les Vietnamiens utilisent l’alphabet latin. Mais, avant la
Révolution d’Août 1945, plus de 90% des Vietnamiens étaient toujours
illettrés. Une telle nation ne pouvait être passionnée de lecture… À
partir de 1945, la campagne d’alphabétisation s’effectue à une grande
échelle à l’appel du Président Hô Chi Minh. À dater de 1955, le qu ố c
ng ữ s’introduit comme langue véhiculaire dans tous les degrés de
l’enseignement, en remplaçant le français.
En
quelques années, la tendance se renverse. En 1979, 84% de la population
est lettrée. Cependant, le pays a traversé 30 ans de guerres pendant
lesquelles les publications sont quasi-stoppées. Les amoureux de la
lecture sont nombreux mais restent des cas isolés.
Après la réunification de 1975, la lecture n’entre toujours pas dans le
quotidien des Vietnamiens et peine encore à se développer réellement. Le
problème vient en grande partie du système éducatif.
Cercle vicieux
La culture et la personnalité d’un individu se forgent via son
éducation d’un côté, et son environnement social de l’autre. Or,
l’éducation passe par les parents et par l’école, lesquels ont une
influence capitale sur la manière dont l’enfant appréhendera son
environnement, et sur les valeurs qui seront les siennes. Cependant, de
manière générale, ni les parents, ni les professeurs ne cultivent de
goût pour la lecture. Difficile donc de susciter l’intérêt des jeunes.
Comme les enseignants ne lisent pas, les élèves même les plus studieux
s’arrêtent aux manuels scolaires. Ils ne sont ni incités à enrichir leur
culture littéraire, ni guidés dans le choix de leurs lectures.
À la maison, les parents sont souvent très occupés et n’ont pas
d’habitude de lire. Rares sont donc ceux qui encouragent leurs enfants à
lire, ne le faisant pas eux-mêmes. Les jeunes optent donc naturellement
pour des activités bien moins intellectuelles, les jeux électroniques,
les émissions télévisées, et les réseaux sociaux, bien plus attractifs
pour un enfant à qui l’on a jamais expliqué l’intérêt de la lecture.
Selon un sondage du secteur éducatif, 86% des parents n’ont jamais lu de littérature enfantine à leurs progénitures.
Dans le cas du Vietnam, le rapport entre l’essor fulgurant des
nouvelles technologies et le goût pour la lecture est différent des pays
possédant une culture historique du livre. Le premier empêche
totalement le second de se développer. Il est d’autant plus complexe
d’inciter une société à s’intéresser à la lecture lorsque son
environnement, loin de l’y aider, l’encourage à pleinement à ne surtout
pas s’y intéresser. – VNA