Le code villageois, un patrimoine à valoriser
C’était pendant la dynastie des Tran, au 17ème siècle, que les codes
villageois étaient les plus florissants. Ils régissaient la vie au sein
d’un village sous toutes ses facettes : ordre et sécurité, conduite des
habitants, travaux d’intérêt public, récompenses et châtiments, devoir
des enfants envers leurs parents et grand-parents, de la femme envers
son mari, devoirs réciproques des frères…
Le code du
village de Nhat Tan, à Hanoï, établi il y a plus de 100 ans, stipule :
"S’assurer que les enfants aient un niveau d’études secondaires est un
devoir auquel aucun père, aucune mère ne doit renoncer". Le code
villageois de Phu Xa Doai, en banlieue de Hanoï, établi en 1906, oblige,
pour sa part, tous les enfants âgés de plus de 5 ans, garçons et
filles, à aller à l’école. "Si au lieu d’envoyer leurs enfants à
l’école, des parents les dorlotent en les laissant faire leurs
espiègleries et se battre, ils devront payer une amende de 30 centimes
et 10 noix d’arec", peut-on y lire.
Dans plusieurs
villages, les clauses portant sur la responsabilité des habitants de
participer aux travaux communs sont appliquées depuis des générations.
Tran Hong Duc, 81 ans, habite à Hanoï : "Mon village natal est Quan
Xuyen, un village de la province de Hung Yen. Le code villageois indique
que toute famille qui marie sa fille à quelqu’un d’extérieur au village
doit cotiser 500 briques pour construire la route villageoise.
Maintenant, cette clause n’existe plus, mais le village appelle toujours
aux cotisations pour instaurer la nouvelle ruralité, pour construire
des chemins bétonnés. De nombreux villageois ont cotisé pour refaire le
porche du village ou la maison communale. Mon village a été reconnu
"village culturel" et "village aux normes de la nouvelle ruralité".
En réalité, dans de nombreux villages, le code villageois existe en
parallèle du droit de l’Etat. Certains critiquent cette pratique,
estimant que ce code qui varie d’un village à un autre pourrait
favoriser une sorte de communitarisme. Le professeur Ngo Duc Thinh,
chercheur en folklore, n’est pas de cet avis.
Selon lui,
le droit de l’Etat hérite de règles universelles des codes villageois.
C’est pourquoi, loin d’être conflictuel, le rapport entre le code
villageois et le droit peut être complémentaire : "A mon avis, la loi
est quelque chose de général, tandis que le code villageois est très
concret. Du coup, on aurait tout intérêt à interpréter la loi sous forme
de code villageois. En réalité, actuellement, plusieurs villages ont
établi leurs codes villageois ou leurs règlements de la nouvelle
ruralité en y introduisant des stipulations de la loi".
Ces dernières années, le mouvement "tout le peuple s’unit pour édifier
une vie culturelle dans les quartiers d’habitation" lancé par le Front
de la Patrie du Vietnam est étroitement lié au programme d’instauration
de la nouvelle ruralité. Les antennes du Front de la Patrie ont
conseillé les autorités locales pour faire en sorte d’enrichir les codes
villageois.
Suivant leurs conseils, les habitants sont
invités à discuter entre eux du contenu de ce qui sera leur nouveau code
villageois, lequel devra ensuite être approuvé par les autorités
locales sur les principes du consensus et de l’héritage d’éléments
positifs du code traditionnel. Les nouveaux codes villageois peuvent
comprendre des règlementations très précises sur les mariages, sur les
cérémonies pour souhaiter la longévité à des seniors, ou encore sur les
funérailles. Les codes villageois continuent d’être remis à jour. Dans
les villages vietnamiens, tradition et développement peuvent toujours
faire bon ménage. -VNA