Le bouddhisme est arrivé au Vietnam le premier siècle avant JC. Mais il a fallu attendre jusqu’au 13ème siècle pour que l'empereur Tran Nhan Tong, après s'être retiré, crée une école propre au Vietnam, le Truc Lam Yen Tu. Sa particularité : le religieux s’intègre totalement à la vie sociale.

En 1299, l'empereur Tran Nhan Tong renonce au trône et à la cour pour mener une vie austère au fin fond de la jungle de Yen Tu. Il prend alors le nom de Huong Van Dai Dau Da (le grand moine ascétique). Plus tard, deux autres maîtres, Phap Loa et Huyen Quang, le rejoignent.

Ensemble, ils créent un nouvelle école, le Truc Lam Yen Tu, Truc Lam signifiant "la forêt de bambou" car c’est dans la forêt de bambou de Yen Tu qu’est née cette école. Truc Lam Yen Tu unifie donc tous les courants existants et toute l’Eglise bouddhique de l’époque. Selon le professeur en philosophie Thai Kim Lan, cet événement marque un jalon dans l’histoire du Vietnam : "l'empereur Tran Nhan Tong a créé une école typiquement vietnamienne. Il a réussi à appliquer la théorie du bouddhisme de manière souple et créative à la société vietnamienne d'alors pour instaurer un nouveau mode de vie plus civilisé. Personnellement, il a toujours mené une vie simple. Bien qu’il ait été empereur, il a toujours pensé aux autres, mettant en avant humanisme, intelligence et éthique."

En plus de 700 ans d'existence, le Truc Lam Yen Tu n’a pris aucune ride. Sa philosophie reste d’actualité, le fidèle étant appelé à pratiquer sa foi tout en assumant pleinement ses devoirs de citoyen au regard de la défense et de l’édification nationales. Le chercheur en culture Nguyen Huu Son explique que "Tran Nhan Tong a créé le Truc Lam Yen Tu sur la base des connaissances que son grand-père et son père lui avaient transmises. En créant ce nouveau courant, il a voulu souligner sa volonté, en tant que religieux, d’intégrer pleinement la vie sociale. Le bouddhisme tel qu’il le concevait devait être étroitement lié à la Nation et à chaque individu. Le religieux pratique sa foi sans se tenir à l’écart de la vie sociale."

Cette idée, c’est un grand maître qui l’a apprise à Tran Thai Tong, le grand-père de Tran Nhan Tong. Il lui disait : "il n’y a pas de Bouddha en montagne, le Buddha est dans ton cœur". Cela veut dire que tout un chacun peut accéder à l'Eveil, qu’il soit religieux ou non. Il suffit de mener une vie saine, de faire preuve de bonté autour de soi. Toujours selon Nguyen Huu Son, cette philosophie a été valorisée par des générations de fidèles : "parler du Truc Lam Yen Tu, c’est parler des pagodes Vinh Nghiem, Con Son et Hoa Nghiem. Ces dernières et la littérature canonique de cette école ont une vitalité fabuleuse. On peut trouver des pagodes appelées Vinh Nghiem ou Hoa Nghiem dans nombre d’endroits, que ce soit à Hue, à Saigon, en Inde ou en Europe de l’Est."

A sa création, sous la dynastie des Tran, le Truc Lam Yen Tu a eu un impact considérable sur la vie politique et socioculturelle du Vietnam. Toutes les politiques de défense de la souveraineté nationale, d’élargissement des frontières, de développement de la culture... de l’époque étaient empreintes de cette philosophie qui peut se résumer en quelques mots : la religion, c’est aussi le service de la Patrie. Aujourd’hui encore, de nombreux Vietnamiens adhèrent à cette philosophie. Le pèlerinage au mont Yen Tu au printemps reste l’un des plus importants du pays, attirant autant de bouddhistes que de simples gens. -VNA