Où en sont les services médicaux en zone de montagne ?
Des premiers médecins de montagne...
Nguyên Thi Manh, cheffe du poste médical de la commune de Lung Tao,
district de Dông Van, province de Hà Giang, a raconté ses histoires
incroyables sur ses premières années au hameau pour donner des soins
médicaux aux résidents. En 2004, elle a quitté Tuyên Quang pour cette
commune frontalière. A cette époque, elle avait 22 ans et tout était
assez étrange pour elle. La commune comptait 670 familles dont 406
étaient pauvres. Elles manquaient de tout, de la nourriture aux
vêtements en passant par l’éducation. Le sorcier "dominait" la vie des
gens, car pour eux, il aidait à guérir les maladies, chasser les mauvais
esprits. Le mot "médecin" était même très suspect à leurs oreilles!
«Quand les gens tombaient malades, je leur demandais de voir le
médecin et ils me disaient qu'ils n’en avaient pas besoin, car le
sorcier était là !». Lorsqu’un membre de la famille tombait malade, ils
invitaient le sorcier chez eux pour faire la cérémonie. Après, si le
malade n'avait pas récupéré, il s'allongeait sur le lit jusqu’à la mort,
refusant obstinément de voir un médecin. A cette époque-là, il y avait
un grand nombre de résidents de Lung Tao qui mouraient à la maison, même
à cause de maladies faciles à guérir, telles que la pneumonie..».
Il a fallu attendre 2005, soit un an après l’arrivée de Manh à Lung
Tao, pour voir les choses évoluer. « Cette année-là, un villageois a
connu une insuffisance cardiaque et un membre de sa famille est allé au
poste médical pour l’informer. Puis le poste médical a donné une aide
d'urgence et l’a transféré à l'hôpital. Grâce à cette aide, il a été
sauvé», explique Manh.
Après cette affaire, les
villageois ont changé leur regard sur le médecin et le poste médical.
Ils ont suivi les conseils du médecin de porter des vêtements chauds en
hiver pour prévenir la pneumonie, de veiller à l'hygiène personnelle et à
celle de l'habitat pour éviter les infections. Le médecin a peu à peu
remplacé le sorcier...
La sensibilisation de la
population a augmenté, mais le poste médical de la commune de Lung Tao à
cette époque était très dépourvu. Manh a reçu sa première trousse de
premiers secours fin 2011 ! Les routes étaient vraiment un défi pour les
cadres sanitaires qui venaient des plaines comme elle. Certains hameaux
nécessitaient des dizaines de kilomètres de marche en forêt. Quant un
villageois tombait malade, les médecins affrontaient ces chemins en
pleine nuit parfois. Manh a déclaré: «Après avoir gagné la confiance des
villageois, si nous n’étions pas venus quand ils avaient besoin de
nous, nos efforts auraient été vains ».
… au Projet 1816
En 2008, en réponse à la politique du Parti d'envoi de cadres
intellectuels pour les zones à population clairsemées, en particulier
les zones montagneuses pour aider les gens dans le développement
économique, social et culturel et l'amélioration de leur vie, le
ministère de la Santé a établi le Projet 1816. Le projet visait à
envoyer en mission des médecins d’hôpitaux de niveau supérieur dans des
hôpitaux de niveau inférieur (de communes, districts) pour transférer
des technologies et améliorer les compétences des cadres médicaux
locaux. Le projet s'est avéré remarquablement efficace.
Le poste médical de la commune Lung Tao, qui a connu des jours très
difficiles, est devenu un établissement spacieux avec deux étages. Il
est équipé de six lits et huit bureaux. Le contingent se compose de six
personnes, dont un médecin généraliste, une infirmière générale, un
cadre de soins sanitaire, une sœur de charité et deux cadres qui
étudient à l’Hôpital de Thaï Nguyên. Il y a 20 infirmières dans 16
hameaux, ainsi chaque hameau compte une infirmière permanente. Ces
infirmières travaillent aussi comme sages-femmes. En outre, la commune
dispose de cinq sages-femmes qui sont des femmes locales formées pendant
18 mois. Donc, le travail médical dans la commune Lung Tao a été assuré
et s’est beaucoup amélioré.
Maintenant, les
habitants des hameaux n'ont pas besoin d'aller à Hanoi, qui est à la
fois loin et trop cher, pour un traitement médical poussé, car il leur
faut une heure de moto pour atteindre la Polyclinique du district de Yên
Minh. C'est le plus grand centre médical des quatre districts
montagneux de la province de Hà Giang (Dông Van, Mào Vac, Yên Minh et
Quan Ba).
La Dr Nguyên Thi Ngoan, directrice
adjointe de l’Hôpital de Yên Minh a informé qu'elle et ses collègues ont
effectué une opération sur un patient souffrant de saignements de
l'estomac, en utilisant une technique endoscopique. Cette nouvelle
technique est utilisée à l'hôpital depuis fin 2011.
Elle a également déclaré qu’autrefois, l'hôpital était seulement en
mesure d'appliquer des techniques chirurgicales traditionnelles,
laissant une longue incision qui prend beaucoup de temps à cicatriser et
qui peut générer de surcroît des complications dangereuses, en
particulier pour les personnes vivant dans des zones reculées. Depuis le
transfert de la technique de chirurgie endoscopique, l’Hôpital Yên Minh
a effectué plus de 160 opérations. Avec cette technique chirurgicale
moderne, l'hôpital a reçu un nombre croissant de patients provenant
d'autres districts, comme Quan Ba, Mèo Vac et Dông Van. Dans le passé,
les patients qui avaient besoin d'une intervention chirurgicale devaient
aller à l'hôpital provincial voire à Hanoi. Maintenant l’Hôpital Yên
Minh peut effectuer presque toutes les chirurgies endoscopiques, voire
certains cas difficiles, comme l'appendicectomie, la cholécystectomie,
l'hystérectomie et l'élimination des kystes ovariens.
Parlant du Projet 1816, le Dr Luong Dinh Cham, directeur adjoint de
l’Hôpital de Yên Minh, a souligné que des délégations de médecins des
grands hôpitaux et des hôpitaux centraux viennent souvent à l'hôpital du
district pour partager leur savoir-faire. Chaque année, des médecins de
l’Hôpital de Yên Minh sont formés dans des hôpitaux centraux pour
améliorer leurs compétences et maîtriser de nouvelles techniques.
L'hôpital prend toujours les devants et est actif dans la formation des
travailleurs médicaux des hameaux. Ainsi, le personnel des 15 postes
médicaux des communes du district a été formé à l'Hôpital de Yên Minh.
Le Docteur Cham a confié: «L'hôpital a attaché une
grande importance aux compétences de diagnostic des médecins des hameaux
parce que les examens et les traitements à ce niveau sont très
importants, surtout avec les conditions de transport difficiles des
zones montagneuses. Si les cadres sanitaires de la commune et des
hameaux ont de bonnes compétences professionnelles, ils peuvent traiter
des cas urgents en attendant l'ambulance de l'hôpital du district qui
transportera le patient à un hôpital de rang supérieur ».
Quelques chiffres clés sur le Projet 1816 (période 2008-2010) :
- 72 hôpitaux impliqués dans l'envoi de personnel en mission.
- 3.665 cadres médicaux envoyés en mission.
- 2.504 techniques médicales transférées.
- 1.453 cours de formation sur l'amélioration des compétences professionnelles réalisés.
- 40.531 travailleurs de la santé à des niveaux inférieurs formés.
- 802.486 patients ont reçu des visites et des traitements médicaux.
- 11.697 cas ont été traités par chirurgie. – VNA