L’homme qui a plus d'un tour dans sa tête dure
Nguyên Quang
Hiên est né à Hô Chi Minh-Ville (Sud) dans une famille où aucun membre
ne pratique les arts martiaux. Pourtant, à l’âge de huit ans, Hiên s’est
pris de passion pour les sports de combat et s’est inscrit dans un club
local de Vovinam. En 1997, après le décès de sa mère, son père a dû
nourrir la famille avec son métier de xe ôm (moto-taxi). Pour l’aider,
il est devenu agent de sécurité et, malgré les conditions difficiles,
n’a pas tiré un trait sur sa passion.
Endurcir le corps et l’esprit
"Un jour, confie-t-il, j’ai eu une révélation en assistant au
spectacle d’une troupe chinoise de kung fu. J’ai été particulièrement
impressionné par le numéro où les gars se frappent la tête avec une
barre de fer jusqu’à ce que cette dernière se casse en deux. Là je me
suis dis : + c’est ça que je veux faire !+".
Hiên a
commencé l’entraînement... dès le lendemain. Au début, il a utilisé un
bâton de la grosseur du bras, et s’est frappé la tête, au début
doucement puis de plus en plus fort, afin de s’habituer à supporter la
douleur.
Plus tard, il a ficelé une centaine de
tiges de rotin pour en faire un paquet, et s’en est servi comme pushing
ball. Poings, bras, tête... tout y est passé. Pour travailler
l’endurcissement physique mais aussi psychologique. Car la performance
physique ne vient pas uniquement de la force musculaire. L’esprit aussi
doit être endurci.
Le lendemain, il s’est retrouvé
avec de nombreux hématomes. Il a dû arrêter l’entraînement et prendre
des médicaments pendant un mois.
Au fil des
entraînements - et des blessures -, sa tête s’est habituée aux coups.
Dire qu’il a "la tête dure" n’est pas un vain mot. Après plusieurs
années d’entraînement, Hiên a donné son premier show en 2005 à Hô Chi
Minh-Ville. Comme entrée en matière, il a cassé avec la tête 60 briques
en 45 secondes. Ensuite, il a fracassé des piles de briques. Autant
d’exploits souvent réalisés avec les mains mais rarement avec la tête.
Cette partie de son corps, Hiên la bichonne. Trois fois par mois, il se
la rase. Car selon lui, la tête doit rester chauve. "Ma tête n’est pas
en fer ou en cuivre, et plus d’une fois elle a été écorchée. Une tête
sans cheveux cicatrise mieux", explique-t-il.
Son
père lui a plus d’une fois conseillé d’abandonner ses exploits. Car,
selon lui, ce n’est qu’une passion, elle ne nourrit pas son homme et en
plus elle peut s’avérer dangereuse pour la santé. "Mais après quelques
journées d’arrêt, la fièvre me reprenait. Impossible d’y échapper. C’est
une passion, elle fait partie de moi maintenant".
Et des incidents
Une fois la tête endurcie, il a commencé à entraîner les parties
molles... En 2007, au Festival des fleurs de Dà Lat, il a réalisé
l’exploit de pousser sur 80 m un camion de 7 tonnes. Petit détail : il a
utilisé une pique dont l’extrémité pointue était posée sur sa gorge.
Ensuite, il a poussé de la tête un camion de 2,5 tonnes chargé de 50
personnes. Après, beaucoup de curieux sont venus examiner de près son
crâne et son cou pour vérifier leur état !
Mais
certains spectacles ne se passent pas aussi bien. Une fois, il a bien
failli y laisser sa peau. Il était allongé sous une planche de bois et
une voiture devait lui passer dessus. Le véhicule est monté sur la
planche puis s’est arrêté. Le public s’est mis à applaudir. Cinq minutes
plus tard, la voiture s’est retirée et Hiên est apparu sans
connaissance. "Quand le minibus m’est monté dessus, son poids m’a
empêché de respirer, confie-t-il en riant. J’accepte de faire tout ce
qui est le plus original et le plus dangereux. Et j’en accepte toutes
les conséquences. C’est juste l’amour de l’art".
En
2010, Hiên a présenté son numéro de lever de seaux d’eau avec les
paupières. Il utilise pour cela deux chaînettes terminées par des
hameçons accrochés à ses paupières. Au bout des chaînettes pendent deux
seaux de 4,5 kg. Les paupières, et plus largement les yeux, sont très
sensibles. Durant des nuits, ses paupières gonflées et douloureuses
l’ont empêché de fermer les yeux. Mais pas question d’abandonner...
Pour Hiên, la force réside moins dans les muscles que dans l’esprit.
Fort psychologiquement, très exigeant avec lui-même, Hiên l’est
certainement. Mais dans la vie quotidienne, il se révèle doux et
sentimental, amical et modeste avec tout le monde. Un vrai colosse au
cœur tendre. – VNA