Cette semaine, nous partons sur les Hauts Plateaux du Centre, pas seulement parce qu’il y fait bon vivre, mais aussi parce que les Bahnar y ont élu domicile. Les Bahnar, donc : une ethnie qui partage un certain nombre de coutumes ancestrales avec les Ede et les Mnong, que nous commençons à bien connaître, mais qui présente aussi de très nombreuses particularités que nous sommes bien sûr avides de découvrir.

Egalement appelés Boh Nam, Roh ou Ala Kong, les Bahnar ont pris pied sur les Hauts Plateaux du Centre (Tây Nguyên) depuis plusieurs siècles déjà. Aujourd’hui, ils sont encore 227.000, divisés en plusieurs sous-groupes aux noms aux consonances exotiques et gutturales : Ro Ngao, Ro Long, To Lo ou Go Lar Krem, par exemple… Cela étant, tous les Bahnar se comprennent entre eux puisqu’ils parlent la même langue, une langue qui appartient au groupe des langues austro-asiatiques. Mais là, seuls les linguistes les plus distingués seraient à même de comprendre. Et comme la pédanterie universitaire n’est pas de mise sur nos ondes, contentons-nous de savoir que les Bahnar parlent tous la même langue.

Les Bahnar vivent essentiellement dans les provinces de Gia Lai, de Kon Tum, et dans la partie méridionale du Centre. Le climat des Hauts Plateaux est rude - on ne le dira jamais assez, ce qui a d’abord poussé les Bahnar à cultiver sur brûlis. Heureusement, dès le début du 20ème siècle, le Kinh les ont initiés à la riziculture inondée.

Chez les Bahnar, ce sont les femmes qui décident ! Qu’on se le dise ! Comment ? On me signale, chères lectrices, que vous êtes déjà prêtes à plier bagage pour rejoindre ce pays de cocagne où, une fois n’est pas coutume, la femme régente tout ? Attendez, pas si vite ! Même si les femmes qui ont du pouvoir, ce sont quand même elles qui travaillent le plus. Très tôt le matin, elles partent dans les champs… Eh oui, voilà qui calme déjà quelques ardeurs, non ? Les femmes bahnar sont donc des paysannes, dures à la tâche, mais aussi des tisseuses hors pair. Créatives et habiles, elles sont capables de créer toutes sortes de motifs pour décorer leurs vêtements, leurs nappes et leurs couvertures.

« A l’âge de 14-15 ans, j’étais déjà capable de tisser n’importe quoi, nous dit La Lan Thi Minh, une tisseuse de renom, c’est ma mère qui m’a appris à tisser, et elle-même l’avait appris de ma grand-mère… Maintenant, il y a des ateliers où les moins jeunes apprennent aux plus jeunes… Il y en a qui se défendent bien, d’ailleurs ! ».

Les Bahnar, dont la vie reste encore rustique et traditionnelle, habitent dans des maisons sur pilotis, ce qui leur permet de garder un relatif isolement en saison des pluies, mais aussi de se prémunir d’éventuels visiteurs indésirables : serpents et autres bêtes sauvages, par exemple… Les maisons anciennes sont plutôt bâties en longueur. Il faut dire que plusieurs générations y cohabitent. Quant à la maison communale, le fameux Rong, elle sert aux activités collectives : réunions, cérémonies rituelles, festivités.... Autant d’occasions de se retrouver pour vider quelques jarres d’alcool et frapper les gongs. « Les Bahnar sortent les gongs lors des cérémonies importantes pour créer une ambiance festive. C’est la tradition, en tous cas », indique Dinh Srum, de la province de Dak Lak.

Les gongs, c’est vrai, qui ont une valeur très symbolique pour les Bahnar, mais aussi d’autres instruments comme le T’rung et le Klong put, ou encore les récits épiques… C’est qu’il est richissime, le folklore bahnar ! Le seul fait de l’évoquer revient à ouvrir une boîte de Pandore, ce que nous ne manquerons pas de faire lors de nos prochaines pérégrinations ethnico-chromatiques hebdomadaires.
A la semaine prochaine, donc !... -VOV/VNA