Le théâtre chèo se réinvente pour séduire les spectateurs
Les décors sont minimalistes, les maquillages et les costumes hauts en couleurs, simples et élégants. La langue est populaire et savoureuse, truffée de dictons et de proverbes. Quant à la danse, ils composent un véritable langage corporel, qui demande à la fois grâce et rigueur, délicatesse et technicité...
Avec le chèo, la tradition est dans l’air du temps.
Ces derniers temps, la petite scène
du théâtre chèo du Vietnam a fait peau neuve grâce à des
représentations qui ressemblent au chèo traditionnel d’autrefois.
Entretien avec Thanh Ngoan, Artiste Émérite et présidente dudit théâtre.
Comment vous est venue l’idée de modifier le mode de représentation du chèo ?
Le
théâtre populaire chèo se joue traditionnellement sur de grandes
scènes. Depuis trois ans, il donne des représentations sur des petites
scènes, mais ces dernières ne sont pas régulières car le public est
encore sceptique. J’ai réfléchi longuement pour trouver une bonne
solution. À Hanoi, les lieux populaires de représentation des arts
traditionnels sont nombreux. On peut citer les marionnettes sur l’eau de
Thang Long. Le chèo est aussi un art traditionnel. De plus, nous
avons beaucoup d’artistes de talent. Il n’y a aucune raison pour que ce
nouveau mode de représentation ne puisse attirer de spectateurs
réguliers. La question est de savoir comment faire. Finalement, nous
avons décidé de réorganiser la petite scène. Les pièces sont jouées sur
des nattes, dans des lieux familiaux, comme avant.
Il n’y a pas
de barrière de la langue avec les marionnettes sur l’eau. Cependant,
pour apprécier le chèo , il faut comprendre le vietnamien. Comment donc
faire pour attirer aussi les étrangers ?
Ne pas parler la
même langue est évidemment une barrière. Mais le chèo a d’autres
atouts, et notamment la musique, qui le caractérise. Pour les
spectateurs étrangers, nous ne présentons pas des pièces complètes. Nous
leur montrons seulement des extraits traduits représentatifs de cet
art. Par exemple, quand Xuy Vân – l’un des personnages – déroule de la
soie, les spectateurs doivent surtout s’intéresser à la danse et la
voix. Par ailleurs, nous jouons des airs caractéristiques du chèo pour
présenter les instruments.
Le chèo vient surtout des zones
rurales du Nord, mais il est maintenant joué en ville. Est-ce qu’il y a
des différences entre les deux ?
Il y a des différences que nous nous efforçons de gommer. Sur la petite scène, nous étendons des nattes fleuries pour avoir un espace luxueux et élégant. Mais le plus important, c’est de reprendre les éléments constitutifs du chèo traditionnel (vêtements, instruments, orchestre…). Concernant le programme, nous en avons écrit cinq différents pour s’adapter aux différents types de spectateurs. Le personnage conduisant le récit peut être un vieux personnage, deux bouffons, un couple… Nous avons aussi mis en place une séquence pour ceux qui étudient cet art.
À présent, la représentation sur petite scène est-elle stabilisée ?
Depuis
le début de cette année, nous jouons chaque vendredi. Nos programmes
visent à maintenir et à valoriser l’art traditionnel. C’est pourquoi,
nous sommes exigeants en termes de qualité. N’importe quel artiste ne
peut pas jouer sur une petite scène. Le théâtre chèo du Vietnam a mis
en place un comité d’évaluation pour juger nos artistes. À côté, nous
continuons d’élaborer des programmes pour la grande scène pour les jours
de fêtes ou du Têt. – VNA