À Hô Chi Minh-Ville, on utilise depuis peu le Suboxone, à titre expérimental, pour traiter la dépendance aux opiacés. Un médicament qui pourrait bien changer la vie des toxicomanes.

Le traitement par Suboxone donne des résultats prometteurs auprès des toxicomanes qui suivent une cure de désintoxication. Il a été mis en place il y a six mois au Centre de médecine préventive de l’arrondissement de Go Vâp (Hô Chi Minh-Ville), à titre expérimental.

L.H.P, 29 ans, domicilié dans l’arrondissement de Binh Chanh, se drogue depuis plus de six ans. «J’ai commencé car j’étais dans une mauvaise passe. J’étais un jeune homme en bonne santé, aujourd’hui, je ne suis plus qu’une épave», partage-t-il. Et d’ajouter : «Depuis trois ans, j’ai essayé plusieurs fois de suivre des cures de désintoxication, mais je n’ai jamais réussi à m’en sortir».

Trente-sept patients sous Suboxone

Lorsqu’il a appris l’existence du programme de désintoxication par Suboxone, L.H.P a décidé par lui-même de l’intégrer. En trois mois, sa santé s’est améliorée. «J’espère que cette fois, je réussirai à sortir de l’engrenage de la drogue», confie-t-il.

N.Q.B, lui aussi sous Suboxone, raconte: «J’ai déjà participé à cinq cures de désintoxication. Mais à chaque fois, j’ai rechuté peu après». Aujourd’hui, il a franchi un pallier et ne ressent plus de manque. Il va mieux et a trouvé un emploi.

Au total, 37 patients participent volontairement au traitement de substitution par Suboxone. «Ce programme a pu être mis en place, après un an de préparatifs, grâce à l’aide des experts de l’organisation française GIP-ESTHER (Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau) et de l’Institut national de l’abus de drogues- NINDA (États-Unis)», indique Trân Trung Hoà, directeur.

Tous les patients du programme ont arrêté de se droguer, même un toxicomane dépendant depuis 45 ans. Directeur du Service de la santé de Hô Chi Minh-Ville, le Professeur-Docteur Nguyên Tân Binh, espère, à la suite de ces résultats spectaculaires, que le Centre de médecine préventive puisse traiter 200 toxicomanes supplémentaires. Il va aussi demander au ministère de la Santé de développer cette nouvelle méthode de traitement dans tout le pays.

Les défis de la désintoxication

Hô Chi Minh-Ville compte, à l’heure actuelle, 2.000 toxicomanes sans domicile, qui doivent être admis dans les différents centres de cures. Les activités de désintoxication à domicile ou au sein des communautés ont certes été renforcées, mais elles n’attirent que 537 patients. Pas assez au vu du nombre de toxicomanes, qui selon les estimations, se monte au total à 35.000.

À noter aussi que quelque 2.140 consommateurs de drogue ont bénéficié, jusqu’à aujourd’hui, d’un traitement à la méthadone dans 13 établissements médicaux de la ville. Toutefois, selon le lieutenant colonel Nguyên Si Quang, de la Police municipale, la consommation de méthamphétamine connaît une hausse, conduisant à une augmentation de la criminalité. En 2014, la ville a saisi 39 kg de cette substance. Soit une augmentation de 6,6% par rapport à l’année précédente.

M. Quang note encore que les taux de rechute chez les consommateurs de drogue sont élevés. Les résultats des programmes de soin communautaires et à domicile ne sont pas probants. Près de 78% des consommateurs de drogue ont rechuté après un passage dans un centre de désintoxication.

Lutter contre le trafic transfrontalier

Le Premier ministre Nguyên Tân Dung a demandé aux ministères et localités de faire écho au Mois d’action de prévention et de lutte contre la drogue (juin). Le chef du gouvernement aimerait un renforcement de la communication et de la prévention sur les méfaits de la drogue, en particulier des drogues de synthèse et des psychotropes. En outre, il souhaite que les nouvelles méthodes concernant le traitement de l’addiction aux drogues soient appliquées au plus vite. Les toxicomanes qui s’en sont sortis doivent aussi être mieux soutenus dans leur réinsertion sociale. Le ministère de la Police a, quant à lui, donné comme mission aux forces de police de lutter contre le trafic de drogue transfrontalier. Entre autres. Les ministères de la Défense et des Finances doivent faire de même auprès de leurs forces spéciales, implantées dans les aéroports internationaux et les ports.

Ce mois d’action est organisé chaque année dans le but de sensibiliser la population aux dégâts que cause la drogue. Il vise aussi à réduire la transmission du VIH et à maîtriser la progression de la toxicomanie, un fléau social touchant essentiellement les hommes (90%), dont 75 % sont au chômage ou sans emploi stable. -CVN/VNA