“Le jour commémoratif” évoque les douleurs de la guerre
“Dans cette pièce, bien des détails ont été tirés de ma propre vie,
d’autres m’ont été racontés par des vétérans américains torturés par la
guerre au Vietnam”, s’est confié Brian Delate au public hanoien.
Brest Westmoreland, le personnage incarné par Brian Delate, est aussi
un ancien combattant américain au Vietnam. Le public le voit sur scène
souffrir de ce qu’on appelle “trouble de stress post-traumatique”, qui
désigne un type de trouble anxieux commun à bien des vétérans de guerre
américains.
Brian Delate lui-même a été un sergent
stationné dans la province centrale de Quang Ngai, en 1969-1970. “A
mon retour du Vietnam, j’ai beaucoup souffert, victime du “trouble de
stress post-traumatique”. Je paniquais souvent, je commettais des actes
violents et j’avais des cauchemars, des troubles psychologiques et
mentaux. Je ne savais pas où j’étais, ce que je faisais. Ça a duré très
longtemps. Puis ça s’est calmé, jusqu’au jour du 11 septembre 2011.
Lorsque j’ai vu cet avion percuter la tour du centre commercial, toutes
les horreurs de la guerre se sont ravivées en moi. Ça m’a poussé à
choisir la voie de l’art.”
L’histoire se passe la
nuit précédant le jour commémoratif du 11 septembre, dans un petit
appartement new-yorkais. Brest Westmoreland s’apprête à se suicider. Sa
mémoire brûlante le hante, le menace, le pourchasse sans pour autant
qu’il parvienne à appuyer sur la détente du pistolet. Brest se
transforme en des compagnons, des gens qu’il a rencontrés au Vietnam
pendant la guerre. Dans sa mémoire, réapparaissent des scènes de raids
terrestres et aériens, de pillage, de chasse, de massacre.
Brest est l’unique personnage de la pièce, ou presque, puisqu’il y a
également un fantôme, incarné par l’actrice vietnamienne Le Khanh :
“L’auteur et le héros de la pièce, Brian, a reproduit sur scène son
propre vécu. J’ai été bouleversée par le caractère spirituel de cette
pièce. Avec Brian, j’ai essayé de donner le meilleur de moi-même pour
que le public comprenne ce que nous exprimons, et ressente ce sentiment
qui nous anime.”
Entre les souvenirs horribles,
s’invitent quelques instants apaisants. C’est lorsque Brest se remémore
les lettres envoyées par ses proches, l’obligeance dont lui font part
ses connaissances, lorsqu’il pense à sa famille, à sa vie aux Etats-Unis
qu’il souhaite retrouver immédiatement.
Nguyen Thi
Minh Thai est une critique de théâtre: “Dans la guerre, le vainqueur et
le vaincu souffrent tous les deux. Les traumatismes psychologiques sont
communs, sauf qu’ils changent de forme d’une partie à l’autre. Au
Vietnam, les personnes qui souffrent le plus sont les femmes et les
mères.”
C’est dans le cadre des échanges culturels
visant à réconcilier et à améliorer la compréhension mutuelle entre
Vietnamiens et Américains que l’Association Vietnam-Etats-Unis, en
collaboration avec l’organisation américaine SHI et avec le Théâtre de
la jeunesse à Hanoi, a produit “Le jour commémoratif”. Les recettes de
la représentation seront reversées aux victimes vietnamiennes de l’agent
orange.
Edward Tick, médecin et poète,
co-fondateur et chef de SHI: “L’art est un pont d’échange pour se
comprendre et s’aimer les uns les autres. Il y a beaucoup de choses
qu’on ne peut exprimer qu’à travers l’art. Cette pièce a pu être
présentée au Vietnam. Pour moi, ce n’est pas qu’une réussite, c’est une
victoire. C’est plus que magnifique!”
“J’ai écrit
+Le jour commémoratif+ pour que ceux qui n’ont jamais vécu la guerre
comprennent ce que d’autres ont dû subir, avec ces tortures et ces
souffrances qui viennent après la guerre”, s’est confié Brian Delate,
sous les applaudissements incessants. – VNA