« Le Général Giap, aux côtés du président Ho Chi Minh, est le symbole de la lutte pour la libération et l’indépendance du Vietnam», a confié Pierre Laurent, Secrétaire national du Parti communiste français (PCF), en marge d’une cérémonie célébrant le 40e anniversaire de la signature des Accords de Paris, cette dernière a été précédée d’un hommage rendu au Général Vo Nguyen Giap qui vient de s’éteindre à l’âge de 103 ans.

« Nous sommes évidemment très touchés par sa mort. Ces derniers jours, dans l’Humanité, nous avons consacré un grand dossier à la vie et au combat du Général Giap. Le PCF a accompagné le peuple vietnamien dans son œuvre de libération, nous avions dans notre cœur la lutte du peuple vietnamien, c’est pourquoi, nous avons accueilli pendant 5 ans la délégation vietnamienne qui conduisait les négociations des Accords de Paris. Et dans ces combats là, nous étions proches du Général Giap. Pour nous, le Général Giap est un frère".

Dans son discours prononcé lors de la cérémonie pour rendre hommage au Général Giap, le dirigeant du PCF a dit: « Le Général Giap fut un soldat au service de son peuple et du genre humain tout entier… Pour défendre son indépendance, le peuple vietnamien a dû prendre les armes et c’est à un général qui n’avait fait aucune école militaire, à un général qui se disait lui-même « un général de la paix, et non de la guerre » qu’il confia le soin de mener le combat jusqu’à la victoire. Giap, comme tous ses camarades, comme tout le peuple vietnamien qui endura tant de souffrances, d’injustices et d’ignominie, ne s’est jamais trompé ni d’ennemi, ni de combat : « Unissons nous dans la lutte pour la paix »… La victoire de Dien Bien Phu, puis la victoire du peuple vietnamien ont rendu dignité et espoir à tous les peuples du monde en prise avec la domination, le colonialisme et l’impérialisme. « Les peuples font l’histoire», voilà ce que le peuple vietnamien a rappelé avec force à tous».

Pour sa part, Mme Hélène Luc, sénatrice honoraire, membre du PCF, ancienne présidente de l’Association d’amitié France-Vietnam a fait part de sa «très grande tristesse» et «son chagrin» lorsqu’elle a appris la mort du Général Giap. « Le général Giap représente tellement la lutte coloniale et pour l’indépendance et la liberté du Vietnam, pour le bien-être du peuple vietnamien que nous avons ressenti comme la perte d’un être cher, d’un membre de notre famille», a-t-elle confié.

Et d’ajouter : « Le Général Giap avait une grande force, il était très compétent, un géant, un stratège militaire hors pair et reconnu dans le monde entier. Mais si le Général avait commencé très tôt à être militant de la décolonisation et devenu ce qu’il a été c’est parce qu’il combattait avec le peuple, qu’il s’appuyait sur la force du peuple pour gagner la guerre contre les colonialistes français, contre les Américains bien que ces derniers ont des armées puissantes ».

« A Dien Bien Phu, le Général Giap a réussi à faire en sorte que les Français n’ont pas su du tout ce qui se passait, ils ont été surpris. Mais pour cela, il a fallu que les Vietnamiens marchent à pied, en vélo, à cheval… chacun selon ses moyens, et que tout le peuple participe à la lutte contre la colonisation et pour la paix. C’est pourquoi, on peut dire que le général Giap représente pour le monde entier un exemple extraordinaire et aujourd’hui tous les peuples du monde saluent sa dépouille mortelle et reconnaissent ce qu’il a fait ».

Hélène Luc a raconté son unique rencontre avec le Général Giap. « La délégation vietnamienne qui menait les négociations des Accords de Paris est restée pendant 5 ans à Choisy-Le-Roi alors que mon mari était maire de cette ville. Lorsque la guerre a été terminée, nous avons, mon mari et moi, été invités à la Fête nationale du Vietnam, le 2 septembre 1978. C’est ainsi que nous avons eu le bonheur et la chance de rencontrer le Général Giap à Hanoi. Quand il a entendu parler français, il a dit : «ô, c’est vous, les Français. Merci, merci beaucoup ». Mais nous lui avons répondu : « Ce n’est pas à vous de nous dire Merci. C’est à nous de vous dire Merci pour tout ce que vous avez fait pour le peuple vietnamien et comme exemple de lutte dans le monde entier.

Il nous a révélé: « Vous savez que le peuple vietnamien était beaucoup plus faible en nombre d’hommes et en matériel militaire. Mais ce que les Américains n’avaient pas, c’était la motivation des hommes. Et nous au Vietnam, nos soldats, tout le peuple, nous l’avons, c’est pourquoi nous avons gagné la guerre contre les Américains ».

La femme octogénaire qui a consacré toute sa jeunesse aux manifestations de solidarité avec le peuple vietnamien a exprimé sa conviction en un Vietnam puissant et prospère: « Aujourd’hui le peuple vietnamien montre comment il a su continuer la lutte pour l’indépendance et mène de la même manière la lutte pour le bien de son peuple pour améliorer la vie et pour devenir un pays industrialisé en 2020. Je crois que le général Giap, aux côtés de Ho Chi Minh, a semé beaucoup de petites graines et que toutes ces petites graines vont germer et vont faire en sorte que le Vietnam devienne un pays fort dans le Sud-Est asiatique».

Quant à l’historien Alain Ruscio, il n’a pas caché ses sentiments pour le Général Giap: « Mon premier sentiment c’est la tristesse, j’ai le sentiment d’avoir perdu un grand oncle comme on dit dans votre pays. Ce n’est pas la formule mais beaucoup de Français avaient beaucoup d’admiration et d’estime pas seulement pour l’homme historique mais pour l’homme tout court qui était très proche, très accessible, très souriant ».

Il a ajouté : « Moi, je garde le souvenir d’un homme très souriant, qui faisait parfois preuve d’humour, de délicatesse. Mon impression à la première rencontre est que je suis en face d’un monument historique, mais derrière ce monument historique, j’ai découvert un homme, très proche, très modeste ».

« Mon entretien avec lui était en mars 1979. A l’époque, j’étais correspondant de l’Humanité au Vietnam et en même temps historien. Lui-même était très lié au PCF et il connaît le parcours de Ho Chi Minh qui était parmi les délégués fondateurs du PCF au Congrès de Tours en 1920. Le Vietnam était alors en grande difficulté, mais c’était aussi le 25e anniversaire de la victoire de Dien Bien Phu. Je voulais l’interroger sur Dien Bien Phu. Il m’avait accueilli avec beaucoup de gentillesse. Son secrétaire m’a dit qu’il était très occupé et ne pouvait m’accorder qu'une demi-heure ou une heure. Mais on est resté trois heures ensemble. Il possèdait magnifiquement la langue française, et nous n’avions pas besoin d’un interprète ».

« J’ai vécu longtemps au Vietnam. J’y suis allé régulièrement pour travailler et aussi comme touriste. A chacun de mes voyages, j’avais la volonté de rencontrer le Général Giap, de lui poser des question sur sa vie, sur ses sentiments, sur l’évolution de la société vietnamienne, sur l’histoire et il est devenu mon professeur d’histoire ».

Alain Ruscio a souligné les sentiments des Français à l’égard du Général Giap : « Les gens qui connaissent l’histoire savent tous que les Vietnamiens en 1945-1946 ne voulaient pas la guerre. Le président Ho Chi Minh est venu en France en 1946 pour négocier avec les Français dans la perspective de maintenir de bonnes relations entre le Vietnam indépendant et la France républicaine. Si la guerre a quand même éclaté, c’est la faute des colonialistes français. Une fois que la guerre était déclarée, il fallait une dimension militaire. Le Général Giap a été désigné pour cette tâche, il a donné la guerre loyalement et il a gagné loyalement. Les Français intelligents ne doivent pas tenir rigueur à la défaite à Dien Bien Phu. Seuls quelques réactionnaires, colonialistes attardés ne l’aiment pas, mais nombreux sont les Français qui lui réservent beaucoup d’admiration. -VNA