Le bâti ancien : un patrimoine à vau-l’eau
Les
anciennes maisons sont non seulement des logements, mais aussi des
lieux intéressants d’un point de vue culturel, historique et
architectural. Une vieille maison à trois, cinq ou sept travées,
construite en fonction des conditions de vie et des besoins des
habitants, reflète pleinement l’organisation de l’espace de vie de nos
ancêtres.
Nous nous orientons actuellement vers la
préservation des patrimoines culturels, dont les villages riches en
tradition. Les vieilles maisons, un des principaux éléments qui
constituent l’architecture de chaque village, doivent donc être
préservées et valorisées. Or, la dégradation et la disparition
d’anciennes bâtisses vont à un rythme alarmant dans l’ensemble du pays.
Hanoi
recense beaucoup d’anciens villages qui concentrent la plupart des
bâtis anciens au niveau national. L’ancien village de Hoà Muc n’en a
plus aucun. Celui de Dông Ngac, qui en comptait plus d’une centaine d’un
siècle et plus, n’en dénombre plus qu’une quarantaine maintenant. En
raison de la forte urbanisation, beaucoup ont été détruits dans le
village de Cu Dà. Le célèbre village séculaire de Duong Lâm, qui recense
une centaine de vieilles maisons, fait actuellement face aux défis du
mécanisme de planification et de conservation.
La maison du 87 rue Ma Mây
La vieille
ville de Hôi An (province de Quang Nam, Centre) en possède un millier,
l’ancien village de Nha Xá (Hà Nam, Nord), dix-huit, très délabrées.
Celui de Dông Hoà Hiêp (Tiên Giang, Sud) n’en recense que huit, le
village de Thô Hà (Bac Giang, Nord) n’en compte qu’une quarantaine, mais
la moitié ont été restaurées sans se soucier d’en préserver le cachet.
Le village de Phuoc Tích (Thua Thiên-Huê, Centre) n’en dénombre plus
qu’une trentaine dont 20 considérées comme rares et donc très
précieuses... Le nombre de vieilles bâtisses est en chute libre, d’où
l’urgence d’établir une stratégie pour leur préservation.
Conserver les traces du passé
Tout
le monde est d’accord avec le fait que le patrimoine bâti doit être
préservé et valorisé, mais pour ce qui est des moyens, les avis
divergent.
Jusqu’à présent, bien que conscients de la
valeur patrimoniale des vieilles bâtisses, les organismes publics locaux
concernés n’ont toujours pas de plan directeur pour leur préservation.
Ces dernières années, le nombre de localités ayant sauvé quelques
maisons ne se compte que sur les doigts d’une main. En outre, leurs
propriétaires, qui jouent un rôle clé, ne font pas encore l’objet d’une
attention particulière.
Il faut considérer les anciennes
maisons comme des lieux de vie à conserver plutôt que comme des musées.
Le fait que des familles de l’ancien village de Duong Lâm à Hanoi, et de
la vieille ville de Dông Van à Hà Giang (province montagneuse du Nord),
aient demandé aux services concernés que le titre de Patrimoine
national attribué à leur localité soit retiré est la preuve de la
rigidité de la gestion publique. Un titre dont ils étaient fiers certes,
mais qui les a empêchés d’agrandir leurs logements.
Ces
propriétaires n’ont pas reçu l’attention voulue, ce qui a provoqué leur
mécontentement... Des spécialistes estiment qu’on ne peut pas reprocher à
la population de vouloir moderniser son logement, les services de
gestion devant assumer leurs responsabilités. Agrandir ou rénover une
ancienne maison en lui conservant son cachet est beaucoup plus coûteux
que la même intervention sur un logement non patrimonial. La pierre, les
tuiles ou le bois sont beaucoup plus chers que les briques ou les
parpaings ! Sans compter le coût de la main- d’œuvre spécialisée,
c’est-à-dire les artisans.
L’aide et le soutien des experts
japonais dans la conservation d’un certain nombre de villages antiques
sont très précieux, mais la partie vietnamienne ne dispose pas d’assez
de professionnels qualifiés pour acquérir leur savoir-faire. Il manque
aussi des experts nationaux compétents et enthousiastes pour la
conservation de ce patrimoine.
Et puis, nous devons nous
poser cette question : préserver les vieilles maisons, oui, mais pour en
faire quoi ? Il ne s’agit pas simplement de les conserver, mais de les
valoriser pour une utilisation en conformité avec le présent. Aux
propriétaires d’en décider l’usage.
Faire coexister bâti ancien et moderne
Si rien n’est fait rapidement pour enrayer la situation, ce patrimoine est condamné à plus ou moins brève échéance.
Dans
l’immédiat, les autorités compétentes doivent recenser ce bâti, le
classer, pour établir des plans de préservation. Parallèlement, il faut
des dialogues francs avec les habitants, car la conservation doit se
faire dans le respect des propriétaires qui ont le droit de vouloir une
vie plus confortable. Par ailleurs, il faut des crédits supplémentaires,
car l’entretien ou la restauration du patrimoine bâti a un coût que la
plupart des propriétaires ne peuvent assumer seuls.
Ce
n’est qu’avec les efforts et le dévouement des organismes publics
concernés, ainsi que le consentement de la population, que les
patrimoines bâtis ancien et moderne pourront coexister, à l’image de Hôi
An qui est plutôt un bel exemple de réussite en la matière.
Les risques de disparition
Le
patrimoine bâti est souvent fragile, vulnérable et parfois même menacé
de disparaître, pour différentes raisons : son âge, les phénomènes de
mode, le mauvais état des structures ou des bâtiments, etc.
L’ignorance,
l’indifférence, les guerres et les conflits, les interventions
humaines, les incendies, les catastrophes naturelles sont aussi des
menaces pour le patrimoine.
Pourquoi protéger le patrimoine bâti ?
Le
patrimoine possède une valeur pour ses caractéristiques propres et
aussi pour ce qu’il évoque et représente. Si nous souhaitons le
conserver, il a besoin d’être protégé, car la perte du patrimoine est la
perte d’une part de notre identité.
Notre regard sur le passé et sur l’avenir détermine les choix de transmission que nous faisons aux générations futures.
Comment faire ?
Chacun
peut protéger le patrimoine bâti, mais comme le patrimoine est aussi un
bien collectif, il importe aussi que des organismes publics le
protègent. -VNA