Rattraper leur retard technologique et atteindre les standards mondiaux est le premier objectif des entreprises vietnamiennes. Un objectif réalisable? Avis d’experts.

Ces derniers temps, des informations ont ébranlé l’opinion publique vietnamienne : la prestigieuse entreprise sud-coréenne Samsung (implantée au Vietnam et connue pour ses appareils électroniques etc., téléviseurs, téléphones mobiles) a lancé au Vietnam un appel d’offre sur 170 types de pièces détachées simples (tels vis, chargeur de piles, écouteurs…) sans réussir à trouver un seul fournisseur vietnamien. Canon, une autre figure emblématique, a déploré le fait que les entreprises vietnamiennes ne pouvaient lui fournir que des cartons d’emballage.

Ces informations ont, il faut bien le dire, blessé l’amour propre des entreprises nationales, qui rêvent de produits «made in Vietnam» aux standards internationaux. Ce sujet a été abordé lors du forum «Standardisation mondiale – Solution pour les produits vietnamiens», récemment tenu à Hanoi sous les auspices de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Vietnam (VCCI) et du ministère des Sciences et Technologies.

Les informations de Samsung et de Canon laissent-elle entendre que le niveau technologique du Vietnam est inférieur à celui d’autres pays dans le monde ? Il semblerait que ce soit le cas, il ne faut pas se voiler la face. La production d’articles courant et l’assemblage d’appareils de marques étrangères constituent déjà une tâche trop ardue pour la plupart des entreprises du pays.

Au forum, les avis étaient variés. «Il est clair que les entreprises étrangères demandent aux entreprises vietnamiennes de produire des articles simples. Mais cela ne signifie pas qu’elles ne peuvent produire que des articles simples», a considéré le Dr. Vu Tiên Lôc, président de VCCI. Selon lui, nombre d’entreprises vietnamiennes ont investi dans des établissements de recherche modernes et dans la formation de leur personnel. Beaucoup ont réussi à créer des produits high-tech. «Les entreprises vietnamiennes sont capables de maîtriser des technologies de pointe, de fabriquer des produits haut de gamme, de se hisser au niveau des pays avancés».

Une compétitivité en berne


Selon le vice-ministre des Sciences et des Technologies, Trân Viêt Thanh, «certains secteurs ont progressé rapidement en termes de technologies, tels que les télécommunications, l’exploitation pétro-gazière, l’aviation, les finances et la banque. Mais dans d’autres, ce sont les technologies arriérées qui prévalent encore, avec des retards de plusieurs décennies par rapport au niveau moyen du monde». Pour pouvoir se moderniser, les entreprises doivent importer des équipements qui, d’un coût élevé, ne sont pas à la portée de toutes.

Le pays cherche à augmenter le taux de produits industriels à l’exportation, notamment high-tech et à diminuer le taux de produits peu transformés. Ceux qui nécessitent nécessitant peu de haut savoir-faire tels textile-habillement, chaussures, articles en bois, produits aquatiques sont toujours en tête en termes de chiffres d’affaires d’exportation, alors que les produits high-tech ne représentent que 5% de la valeur d’exportation.

Le vice-ministre Trân Viêt Thanh a cité le rapport sur la compétitivité globale du Forum économique mondiale (WEF en anglais), selon lequel, en 2014, le Vietnam était classé au 68e rang sur 144 pays pour l’indice de compétitivité globale. Plus précisément : 99e pour le niveau de préparation aux technologies, 93e pour le niveau de transfert de technologies, 121e pour le niveau d’absorption des technologies chez les entreprises, et 123e pour la capacité d’approche des technologies avancées. «Du fait du manque de technologies avancées, les entreprises vietnamiennes ont du mal à améliorer leur compétitivité, leur productivité et la qualité de leurs produits et services. Aussi, il leur est difficile de s’affirmer sur le marché domestique face à la concurrence étrangère, et quasi impossible de gagner les marchés régionaux et internationaux», indique Trân Viêt Thanh.

Manque de vision à long terme


Pour Vu Thanh Thang, vice-président du groupe de technologies Bkav, l’économie vietnamienne s’appuie principalement sur l’exploitation des ressources naturelles et une main-d’œuvre à bas coût. «Pour cette raison, elle risque toujours de dépendre de l’extérieur et d’être incapable d’atteindre le développement durable tant désiré», affirme-t-il.

Cette situation a de multiples causes, tant structurelles que conjoncturelles, selon le vice-ministre Trân Viêt Thanh. Par exemple, l’absence de vision à long terme chez les entreprises, de main-d’œuvre hautement qualifiée et aussi de potentiel financier. «Cela plombe leur progression technologique, déplore-t-il. Nombre d’entreprises ont négligé d’investir dans la recherche, le développement scientifique et technologique». Et d’insister sur le rôle des sciences et technologies comme «facteur décisif de la croissance rapide et qualitative de toute entreprise».

Comment faire pour que les produits vietnamiens puissent rattraper leur retard technologique et atteindre les standards mondiaux ? Selon le Dr. Vo Tri Thanh, directeur en chef adjoint de l’Institut de recherche et de gestion de l’économie nationale, la tâche revient en premier lieu aux entreprises qui doivent être secondées par le ministère des Sciences et des Technologies. Vu l’importance des sciences et technologies pour le développement des entreprises, ledit ministère s’engage à les aider sur divers plans, notamment via l’établissement de liens de coopération avec des instituts de recherche et universités, la création de fonds pour le développement scientifique et technologique, l’introduction des technologies avancées dans la production, le renforcement de la coopération avec l’étranger. -CVN/VNA