Le Dr Lê Quôc Phuong, directeur adjoint du Centre d’information sur l'industrie et le commerce du ministère de l'Industrie et du Commerce, estime que la Chine est un marché commercial important pour le Vietnam. Mais il nous faut analyser l’intérêt réel dans ces relations bilatérales, tout en sachant protéger le marché domestique.

Globalement, la Chine est une puissance économique. Elle est la 2e économie mondiale, ainsi que le 1er exportateur et le 3e importateur du monde.

"La Chine est considérée comme un partenaire de commerce très important à bien des égards, puisqu’elle représente environ 10% des exportations vietnamiennes", note le Dr Lê Quôc Phuong. Inversement, elle représente maintenant près de 30% des importations du Vietnam, principalement des matières premières pour de nombreux secteurs industriels tournés vers l'export, ainsi que des machines, du matériel, des pièces détachées, des composants électroniques...

Les deux parties tirent profit de ces échanges, bien sûr, mais la partie qui saura les exploiter pleinement en bénéficiera davantage. Honnêtement, ces dernières années, le Vietnam n'a pas encore su le faire. Par conséquent, le commerce bilatéral profite plus à la Chine, et ce pour beaucoup de raisons, mais les principales sont les suivantes :

La plupart des marchandises chinoises importées par le Vietnam ne sont pas chères, de sorte que le coût du travail en Chine est parmi les plus bas du monde. En plus, la Chine maintient toujours ses politiques de soutien à l'export. Avec de faibles prix, les produits de consommation chinois sont largement consommés au Vietnam. Beaucoup de matières premières sont importées de la Chine parce que ce n’est pas cher, mais aussi parce que le Vietnam n'a pas encore une industrie auxiliaire développée. Les machines et matériels chinois sont le choix des PME vietnamiennes du fait de leurs contraintes financières et de leur niveau de maîtrise des technologies.

Dans la structure du commerce bilatéral, plus de 70% du chiffre d'affaires total des exportations vietnamiennes proviennent des produits de faible valeur ajoutée. En revanche, plus de 80% des importations de Chine sont des produits chimiques, des produits manufacturés de base, des machines et du matériel. Leur valeur ajoutée est plus élevée que les produits bruts ou semi-finis.

Les entreprises chinoises, qui remportent souvent au Vietnam des marchés EPC (projets «clés en main») dans les secteurs de l'énergie, de l’exploitation minière et de la métallurgie, ont participé à l'augmentation des importations de machines et de matériel de la Chine.

Par ailleurs, "nous ne disposons au Vietnam presque d’aucune barrière technique, de sorte que tous les produits de Chine, quelle que soit leur qualité, peuvent être importés", indique le Dr Lê Quôc Phuong.

De plus, la Chine exploite pleinement les dispositions avantageuses des accords de libre-échange signés avec plusieurs pays ou avec l'ASEAN. Par exemple, dix ans après l'entrée en vigueur de l’accord ASEAN+3, les exportations chinoises au Vietnam ont augmenté de 25 fois, tandis que les exportations vietnamiennes vers la Chine ont progressé de 5 fois seulement. "Le Vietnam et certains autres pays de l'ASEAN ne profitent pas encore des nombreux avantages dont ils disposent", reconnaît-il.

Il nous faut nous protéger

Ces derniers temps, beaucoup de problèmes ont été constatés avec les importations de Chine, compris de la nourriture avariée. Que faire ? "Comme je viens de le dire, le Vietnam n’a presque pas de barrières techniques aux importations chinoises, en matière de sécurité sanitaire des aliments, de normes de sécurité...", déplore le Dr Lê Quôc Phuong. Par conséquent, de nombreux produits provenant de la Chine sont de faible qualité ou ne sont pas aux normes.

"Afin de régler ce problème, il faut d'abord établir des normes techniques de qualité, de sécurité... pour les aliments et biens de consommation importés au Vietnam. Cela contribuera à limiter les importations de produits ordinaires, en particulier de mauvaise qualité. En outre, nous devons promulguer une réglementation administrative pour les portes-frontières auxquelles seront soumises les différentes catégories de produits chinois", propose-t-il.

Ces mesures sont compatibles avec les règles de l'OMC et nous devons en profiter au maximum pour limiter l'importation de marchandises de mauvaise qualité ou qui ne répondent pas spécifiquement aux besoins de notre pays, ce qui permettra de rééquilibrer le commerce bilatéral. "C'est de cette façon que nous pouvons nous protéger et tirer le meilleur de ces relations de commerce avec la Chine, et ce, de manière tout à fait légale", conclut le Dr Lê Quôc Phuong. -VNA