Ces dernières années, à l’occasion du Têt, nom donné au Nouvel An traditionnel vietnamien, nous avons vu réapparaître des images du temps passé, avec cet art ancestral revenu à la mode dans la société vietnamienne : la calligraphie.

Tombé dans l’oubli durant de longues années, ce noble art fait revivre une belle tradition propre au pays, comme le Phénix renaît de ses cendres.

"Chaque année s'ouvre la fleur du pêcher
On retrouve le vieux lettré encre de chine, papier pourpre étalés
Sur un trottoir parmi tant de passants" ( Le vieux lettré calligraphe-Vu Dinh Lien )

De nombreux Vietnamiens -qu'importe leur classe sociale- demandent, à l’occasion du Têt, une calligraphie. Cela se déroule souvent au Temple de la Littérature de Hanoi, première université du Vietnam, ou dans certaines rues, telles Ba Trieu, Ly Thuong Kiet, etc. Ces idéogrammes retranscrivent les voeux pour l’année à venir.

"Personne ne vend de calligraphie, seuls les papiers pourpres sur lesquels ces dernières seront réalisées peuvent être achetés au préalable. En effet, les calligraphes sont, dans une certaine mesure, des humanistes et offrent des présents à travers le pinceau et les caractères réalisés avec celui-ci", confie un maître calligraphe.

Ce travail d’écriture semble simple au premier abord mais revêt bon nombre de significations et une symbolique forte. En général, chacun a sa raison : les élèves demandent souvent les lettres "Esprit vif" (Tri) et "Diligent" (Cân) pour avoir l'énergie d'en faire davantage, ou encore "Réussite" (Dô, Dang khoa) pour réussir aux concours ; les hommes d’affaires aiment faire inscrire les idéogrammes "Prospérité" (Thinh vuong) et "Gains"(Tai lôc.); les passionnés en calligraphie tendront plus vers les mots "Calme" (Tinh), "Coeur" (Tâm) et "Patience" (Nhân), etc.

Malgré la simplicité et la sobriété de ces lettres, chacune implique une philosophie profonde quant au message qu'elles revêtent et sa façon de l’écrire. Certains Vietnamiens les offrent également à des amis ou des proches.

A la différence des vieux lettrés calligraphes d’autrefois, les maîtres en calligraphie d’aujourd’hui sont des jeunes . Ceux-ci possèdent de beaux traits comme "le vol du dragon" ou "la danse de phénix", qui sont tout aussi beaux que ceux des vieux lettrés du temps passé. Ils sont étudiants en caractères sino-vietnamiens (Han Nôm), certains d’entre eux ont même été primés lors des concours de calligraphie, d’autres ont découvert cet art afin de mieux le comprendre.

Ces élèves dont la plupart sont encore lycéens se réunissent autours des maîtres dans la cours du Temple de la Littérature pour demander une calligraphie. Ces jeunes, issus de l’époque Internet, sont toutefois très respectueux et toujours passionnés de poursuivre un beau trait culturel de l’époque de leurs grands-parents.

On voit même la participation des petits élèves de l’école primaire avec leur visage innocent désirer ardemment et demander une calligraphie. Très enthousiastes, ils ont apporté des papiers calligraphiés à l’encre pour les sécher dans la cour du Temple de la littérature. Ils ne comprennent probablement pas l’entièreté du contenu et la signification de tous ces caractères chinois ou écriture démotique nôm, mais il s’agit d’un signe de joie pour la culture traditionnelle du pays.

Demander une calligraphie à l’occasion du Nouvel An est en vogue en ce moment et ne "détonne" pas dans l’époque actuelle, car c’est un beau trait culturel, dans la tradition des Vietnamiens, qui devrait être préservé. Comme on le dit, savoir estimer sa langue, c’est la façon pour préserver ses mœurs et sa culture. Il est ainsi probable que ces bonnes mœurs perdurent avec le développement et la prospérité du pays. Et ainsi, l’auteur du " vieux lettré calligraphe " ne sera sans doute pas soucieux:

"On ne retrouve plus le vieux lettré
Les hommes du temps passé
Où s'en sont-ils allés ?". - AVI