Architecture verte, une question d’avenir
En quelques années, l’architecture
verte est devenue l’une des priorités du secteur de la construction. Et
comme toute chose qui a le vent en poupe, on en parle beaucoup, mais il
semble que peu aient réellement cerné ce concept et sa nécessité pour
notre (sur)vie. « Certains pensent même que l’architecture verte
concerne… les arbres », s’amuse le Pr.-Dr Pham Duc Nguyên,
vice-président et secrétaire général de l’Association de l’environnement
de construction du Vietnam.
En effet, l’architecture écologique
(ou architecture durable) est un mode de conception et de réalisation
ayant pour objectif de créer une architecture respectueuse de
l’environnement et de l’écologie. Il existe de multiples facettes de
cette forme d’architecture, certaines s’intéressant surtout à la
technologie, la gestion, d’autres privilégiant la santé, ou encore
plaçant le respect de la nature au centre des préoccupations.
Depuis plusieurs années, l’opinion publique est fortement sensibilisée
aux conséquences désastreuses de la pollution et du gaspillage
d’énergie sur l’environnement. Les scientifiques indiquent que les
bâtiments traditionnels consomment 17% de l’eau potable, 28% du volume
de bois, 30-40% de la production d’électricité, 40-45% des autres
ressources énergétiques de la planète. Ils sont aussi responsables de
plus de 25% des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2). Grâce à
l’architecture verte, il sera possible de réduire de plus de 35% les
émissions de CO2 et de 35% la consommation en électricité… Dès lors, on
comprend mieux pourquoi l’intérêt pour les constructions vertes a
véritablement explosé.
Bâtiment écologique, l’habitat de demain
«
Le développement du secteur du bâtiment, si l’on veut qu’il s’inscrive
dans une logique durable, devra progressivement s’orienter vers la mise
en application des technologies vertes », estime l’architecte Pham Thanh
Tùng. Et d’ajouter que le Vietnam étant confronté à d’énormes défis sur
le plan environnemental, les services concernés doivent faire en sorte
que les architectes prennent davantage conscience de la nécessité de
bâtir des constructions écologiques.
Selon Khuong Van Muoi,
vice-président de l’Association des architectes vietnamiens, la
construction de nouveaux quartiers résidentiels au Vietnam - qu’il
s’agisse de grands ensembles ou de logements individuels - prend en
considération cette dimension environnementale. C’est également l’option
du gouvernement, qui encourage les architectes à s’orienter vers la
création de bâtiments verts optant pour des matériaux écologiques.
«
Même si nous avons aujourd’hui de nombreuses politiques qui encouragent
le développement de l’architecture verte, elles manquent encore de
réglementations spécifiques », confie l’architecte Pham Thanh Tùng.
D’après lui, l’architecture écologique présente des intérêts sur le long
terme pour l’homme et la société, mais nécessite un important coût
d’investissement initial. En effet, le coût de construction d’un green
building est de plusieurs fois supérieur à celui d’un bâtiment
traditionnel. Par exemple, une ampoule basse consommation coûte 10-15
fois plus cher qu’une ampoule à incandescence classique, la brique de
terre crue est 25% plus onéreuse que celle en terre cuite
traditionnelle. Sans compter le surcoût d’autres moyens permettant de
conserver ou de subvenir aux besoins énergétiques : double ou triple
vitrage à très faible émissivité, panneaux solaires, système de
recyclage des eaux usées dans le bâtiment, etc. « Beaucoup
d’investisseurs ont refusé de mettre en œuvre des projets d’architecture
verte, pour des raisons de crédits élevés avec pour conséquence de
faibles profits », déplore l’architecte Pham Thanh Tùng.
Un
point de vue partagé par le Pr.-Dr Pham Duc Nguyên. « Les bâtiments
écologiques exigent souvent d’importants investissements initiaux, d’où
la réticence des habitants. Il est vrai que l’augmentation du prix de
revient des ouvrages de construction peut être un obstacle au
développement des +green buildings+ au Vietnam. Raison pour laquelle
l’architecture verte a besoin de l’engagement stratégique de l’État et
du soutien de la population », souligne-t-il.
Et pour illustrer
ses propos, il cite l’exemple de Taïwan (Chine), de Singapour et de la
Malaisie, qui prouve que si les bâtiments verts demandent un coût
initial plus élevé que les ouvrages traditionnels, les profits engendrés
augmentent de 3-4 fois grâce aux économies d’énergies, de ressources,
et à la création d’un meilleur environnement pour les quartiers et leurs
résidents. « Je crois que la création, la restauration, la rénovation
ou la réhabilitation des bâtiments en milieu urbain en respectant au
mieux l’écologie peut en partie résoudre le problème de l’actuel gel du
marché de l’immobilier. Les expériences américaines montrent que les
habitants jettent davantage leur dévolu sur l’achat ou la location
d’appartements dans les bâtiments verts que dans les bâtiments standards
», estime Pham Duc Nguyên.
Économies, confort et écologie
Pour
le Dr Hoàng Manh Nguyên, de l’Institut de l’architecture tropicale
relevant de l’Université d’architecture de Hanoi, l’écoconstruction - ou
construction durable - est une orientation inévitable de l’architecture
du Vietnam dans la période actuelle, car il répond aux trois types
d’aspirations, voire de besoins, des utilisateurs.
D’abord,
vivre dans un «habitat vert» qui privilégie les économies d’énergie
grâce aux énergies renouvelables. Ensuite, respecter les exigences de
confort, de qualité de vie et de santé des occupants. Enfin, préserver
l’écologie, l’environnement et les ressources naturelles. « La pratique
de l’architecture verte impose également des devoirs et responsabilités
de la part des architectes pour les générations futures, afin
qu’urbanisme rime avec respect de l’environnement, et ce sur le long
terme », affirme-t-il.
Investir pour une meilleure qualité de vie
pour les générations à venir mérite certainement quelques sacrifices
économiques aujourd’hui. – VNA