Anh Tuân, l’homme qui met en scène la culture
À Hô Chi Minh-Ville, le nom du metteur en scène Huynh Anh Tuân accompagne depuis 15 ans le Théâtre de l’IDECAF (Institut d’échanges culturels avec la France). Ce qui n’a pas empêché ce bourreau de travail de monter d’autres projets, notamment les marionnettes sur l’eau.
Le
metteur en scène Huỳnh Anh Tuân est connu depuis longtemps comme
l’ambassadeur de la culture traditionnelle du Vietnam à l’étranger. Sous
son égide, le Théâtre des marionnettes sur l’eau Rông Vàng et le
Théâtre traditionnel Nón Lá ouvrent leurs portes deux à trois fois par
jour, afin d’accueillir de nombreux touristes au sein du Palais de la
culture et du travail de Hô Chi Minh-Ville. Un lieu aujourd’hui
incontournable pour les visiteurs. Mais le pari n’était pas gagné
d’avance.
Trouver la bonne formule
La mégapole du
Sud est connue pour être une destination touristique très populaire.
Elle attire 60% des voyageurs étrangers au Vietnam, et est devenue une
escale incontournable pour les étrangers se rendant au Cambodge.
Le Théâtre des marionnettes sur l’eau Rông Vàng, à Hô Chi Minh-Ville.
Auparavant, la ville cherchait à implanter un centre de loisirs aux
caractères traditionnels pour les visiteurs venus du monde entier. Les
secteurs public et privé avaient lancé à titre d’essai des spectacles en
tout genre, mais la mayonnaise n’avait jamais pris.
Les
touristes étrangers ne semblaient pas s’intéresser aux soirées
spectacles lors de leurs séjours à Hô Chi Minh-Ville. C’est en tout cas
ce qu’avait pu constater le metteur en scène Huỳnh Anh Tuân après avoir
voyagé à travers l’Asie : «Le Cambodge était en retard par rapport au
Vietnam dans le domaine du tourisme. Il proposait pourtant un grand
spectacle à Siem Reap sur l’histoire et la culture du pays, +Smile of
Angkor+ (Sourire d’Angkor)».
De même, l’homme était très surpris de voir qu’en Thaïlande, les spectacles touristiques étaient nombreux et attiraient du public. Notamment «Siam Niramit», dont la représentation avait lieu dans un grand espace théâtral pouvant accueillir jusqu’à 2.000 spectateurs, situé au coeur de Bangkok. Comme «Smile of Angkor», cette manifestation culturelle offrait aux visiteurs un regard rétrospectif sur la Thaïlande.
Le spectacle Nón Lá, l’un des succès de Huynh Anh Tuân.
De leur côté,
Singapour, l’Indonésie et les Philippines n’étaient pas en reste dans ce
secteur. C’était une occasion pour eux de valoriser et de faire
connaître les traditions de leur pays, ainsi que de diversifier leurs
produits touristiques.
«Modèles étrangers à l’appui, je me suis
posé la question de savoir pourquoi le Vietnam, Hô Chi Minh-Ville en
particulier, n’avait pas encore trouvé son public ? Les idées étaient
nombreuses mais il fallait dénicher un lieu adéquat», partage Huỳnh Anh
Tuân.
Le metteur en scène n’a pas l’habitude de rester les bras
croisés face aux difficultés. Aussi, il a pris l’initiative de trouver
un endroit approprié, et a opté pour le Palais de la culture et du
travail de Hô Chi Minh-Ville. «L’envergure de ce théâtre n’est pas
aussi importante que ceux accueillant +Smile of Angkor+ ou +Siam
Niramit+. Mais l’espace est bien adapté à la représentation de
marionnettes sur l’eau. C’est aussi ma passion. Pour moi, ce spectacle
avait toutes les cartes en main pour séduire les touristes» , dit-il.
En
2008, sur la base de ce qu’il a pu observer dans l’organisation de
représentations de marionnettes sur l’eau au Parc culturel de Dâm Sen
(toujours à Hô Chi Minh-Ville), ce projet - Théâtre Rông Vàng - a
rapidement été déployé, moyennant un investissement d’un milliard de
dôngs. La salle pouvant accueillir 300 personnes. Les deux premières
années, le nombre de billets vendus n’était pas à la hauteur du
financement. Certaines soirées, le rideau se levait devant une salle
quasi-vide. «Je pense que les voyagistes n’avaient pas confiance en mon
projet. Lorsque le public ne s’intéresse pas à une attraction, les
voyagistes non plus. C’est un cercle vicieux», affirme t-il.
La route vers le succès
Le
projet était alors au bord de la faillite. Le metteur en scène a donc
décidé de mettre en place une campagne de communication, avec notamment
l’édition de dépliants publicitaires mis à disposition un peu partout
dans la ville, dans l’espoir de réveiller l’attention des touristes. Qui
vient à point à qui sait attendre. Au fil du temps, les files d’attente
ont commencé à se former.
Aujourd’hui, le spectacle se joue
deux fois par jour, voire trois fois en haute saison, au lieu d’une fois
auparavant. Outre les étrangers, il accueille aussi des spectateurs
vietnamiens et leurs enfants le week-end.
«Via le Théâtre des
marionnettes sur l’eau Rông Vàng, je constate que la culture
traditionnelle du Vietnam plaît à de nombreux étrangers. Désormais, nous
sommes à l’étroit», confie M. Tuân. C’est ainsi que mi-2012, il a
démarré un second projet : le spectacle Nón Lá, toujours dans le Palais
de la culture et du travail de Hô Chi Minh-Ville. Et en février dernier,
Huỳnh Anh Tuân a achevé la construction d’un théâtre de plein air de
700 m² à Hôi An, à côté du pont de Câm Nam, dans la province de Quang
Nam (Centre). Objectif : y jouer des pièces mettant en scène la vie
quotidienne locale.
Le metteur en scène peut aller encore
beaucoup plus loin. Il sait désormais se débrouiller sans l’aide de
personne, et c’est sans doute sa plus grande force. – VNA