À la recherche de réponses à l'érosion de la biodiversité
Le Vietnam est le 16e pays du
monde en termes de biodiversité. Hélas, cette richesse s’érode
rapidement, en raison notamment de la disparition des milieux naturels.
Le Vietnam figure sur la liste des pays qui
bénéficient de priorités de la part de la communauté internationale dans
la protection de la biodiversité. Environ 40% de sa flore est
endémique.
Le Vietnam compte 21.000 espèces
végétales, 16.000 espèces animales, concentrées dans les régions à haute
biodiversité que sont la cordillère de Hoàng Liên Son, le Tây Nguyên
(hauts plateaux du Centre) et le Nam Bô oriental pour les plus connues.
Selon le Professeur Nguyên Lân Dung, président de
l’Association des secteurs biologiques du Vietnam, chaque année, le
Vietnam tire 2 milliards de dollars de l’exploitation des produits
agricoles, sylvicoles et aquatiques. Dans plusieurs régions, notamment
montagneuses, la vie des habitants est étroitement liée à l’exploitation
de la nature.
Déclin brutal de la biodiversité
Le Vietnam, comme de nombreux autres pays, connaît une érosion
tragique de sa biodiversité. Environ 300 espèces animales et 350 espèces
végétales y sont menacées d’extinction.
La pression
démographique, l’urbanisation, la destruction des milieux naturels et
l’exploitation excessive des ressources naturelles - pour ne citer que
quelques facteurs - menacent d’extinction 28% des mammifères, 10% des
oiseaux et 21% des amphibiens.
Les forêts
concentrent la biodiversité du pays. Il ne resterait au Vietnam que
570.000 ha de forêts «naturelles», c’est-à-dire peu ou pas exploitées
par l’homme, soit 8% du total. Certes, le taux de couverture forestière
du pays augmente, mais il s’agit essentiellement de forêts
monospécifiques à haute production, d’un intérêt biologique quasi nul.
Autre problème, et non des moindres, le braconnage et
le trafic d’espèces, qui sont aussi en forte hausse. La mégafaune
vietnamienne a quasi disparu. Il resterait moins d’une centaine de
tigres dans le pays, et leur disparition apparaît comme inéluctable.
Situation tragique aussi pour l’éléphant qui, avec sa population d’une
centaine de têtes, est déjà condamné. La plupart des espèces de primates
sont menacées. Le braconnage des tortues, pangolins et autres serpents
va bon train, et une partie est exportée vers certains pays de la
région.
Depuis 2010, les gardes-forestiers ont
découvert et traité 140.716 cas de violation de la loi sur la gestion,
la protection des forêts et produits sylvicoles, dont 3.823 concernant
la faune sauvage. Plus de 58.800 animaux sauvages ont été confisqués,
dont 3.078 considérés comme «précieux».
Autre menace
selon les experts, mais bien moindre comparée à la destruction des
milieux : l’invasion d’espèces exogènes. Les chiffres du Département de
préservation de la biodiversité (Département général de l’environnement)
montrent que 94 espèces végétales et 48 espèces animales aquatiques
d’origine exogène ont débarqué au Vietnam, avec des répercussions sur
la qualité des écosystèmes.
Collaboration pour protéger la biodiversité
Le chef de la Commission des sciences, des technologies et de
l’environnement de l’Assemblée nationale, Phan Xuân Dung, l’assure : «La
protection, la gestion de la biodiversité sont l’une des premières
préoccupations de nombreux pays, dont le Vietnam». Il avance comme
preuves «la publication ces dernières années de plusieurs textes
juridiques et politiques pour tenter de freiner son érosion».
Il n’en demeure pas moins que la préservation de la biodiversité n’est
«pas efficace», doux euphémisme. La décentralisation est pointée du
doigt. Si elle a apporté des bienfaits dans de nombreux secteurs, elle
n’a pas été bénéfique à la conservation de la nature. Il faut confier à
l’État la gestion des espaces protégés, et non aux localités.
Actuellement, seulement six des 30 Parcs nationaux sont gérés par l’État
et l’ensemble des 200 réserves par les localités.
«Certaines provinces sont pauvres et n’ont pas suffisamment de fonds
pour protéger en même temps plusieurs réserves. Hà Giang en est un
exemple. Province pauvre peuplée essentiellement d’ethnies minoritaires,
elle compte sept réserves à gérer ! C’est pourquoi, il faudrait
demander aux organismes étatiques de gérer les 200 réserves nationales»,
propose Trinh Lê Nguyên, du Centre de l’homme et de la nature.
D’après les experts, la préservation de la biodiversité dépend à la
fois des fonds que l’on y injecte mais aussi de la volonté des citoyens
eux-mêmes (sans parler de la volonté politique des dirigeants). Les
locaux doivent avoir conscience de la nécessité de protéger la nature
qui les environne. Cela doit passer par une sensibilisation mais aussi -
et surtout - par leur implication afin qu’ils puissent en être les
premiers bénéficiaires. En résumé, il faut que la protection de la
biodiversité (espaces et espèces) améliore concrètement leur vie.
En outre, les autorités locales, ministères et branches concernés
doivent réaliser sérieusement la Directive 286 du Premier ministre sur
le renforcement des mesures pour protéger les forêts, la Stratégie
nationale sur la biodiversité d’ici 2020 et vision 2030.
Il faut continuer de créer des parcs nationaux, des réserves, de
déterminer des régions importantes d’un point de vue écologique pour
élaborer des plans de protection. Les contrôles contre le braconnage et
la destruction des forêts doivent être renforcés. – VNA